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01/12/2015

CUBA FACE AU TERRORISME

cuba usa terrorisme lutte

La plupart des gens associent Cuba aux voitures anciennes authentiques, à l'exquise salsa, aux plages de rêve, aux cigares, aux mojitos ... Rares sont ceux qui savent que le pays vit depuis 1959 sous un niveau de menace de niveau 4. Comment les Cubains le vivent-ils et que pouvons-nous puiser dans leur expérience de spécialistes ?

Au niveau 4 depuis 55 ans

Il y a 57 ans, quand Fidel et les siens l’emportent sur l’armée et chassent le dictateur Batista, les 1 % des Cubains les plus fortunés font eux aussi leurs valises. Il se replient dans leurs résidences secondaires à Miami, à quelque 200 km de l’île. Ils sont persuadés que les rebelles barbus ne tiendront pas plus de quelques mois et qu’ils pourront rapidement récupérer leurs privilèges. Le gouvernement des Etats-Unis lui aussi pense pouvoir bientôt contrôler les « barbudos ». Mais il apparaît bien vite que le nouveau gouvernement rebelle ne se laissera pas mater de sitôt. Fin 1959 le président Eisenhower lance un programme pour saper la révolution cubaine.

C’est le début d’une longue série d’attentats terroristes contre l’île : des crèches, des grands magasins, des hôtels et d’autres bâtiments publics sont la cible d’attaques à la bombe. Le 4 mars 1960 un navire plein d’armes belges saute dans le port de La Havane. Des contre-révolutionnaires armés sèment la terreur dans les campagnes avec le soutien d’une couverture aérienne des Etats-Unis. Ensuite ce sont les actions de sabotage, les explosions par dizaines, les tentatives d’assassinat contre Castro par centaines. Des invasions ont lieu le long de la côte par des commandos armés qui tuent les habitants sans discrimination. Les Etats-Unis n’hésitent pas à utiliser des armes bactériologiques pour anéantir les récoltes et ils répandent certaines maladies comme la dengue, faisant des centaines de morts.

En avril 1961 des bombardiers étatsuniens pilonnent les aéroports cubains pour préparer une invasion militaire par 1.200 mercenaires, dans la Baie des Cochons. L’opération est un ratage total. Les stratèges US parviennent à la conclusion que la révolution ne peut être battue que par l’engagement massif de troupes au sol (1). Les projets sont temporairement mis de côté parce que Washington se prépare entre-temps à la guerre au Vietnam. En 1976 la terreur atteint son point culminant lorsqu’un avion de ligne cubain est abattu. Les 73 passagers au complet y perdent la vie. Les années ’90 connaissent un nouveau pic d’agressions. A ce moment, ripostant à une aggravation du blocus économique, Cuba développe son secteur touristique. Cette fois des hôtels, centres touristiques, autobus, aéroports et autres installations de vacances deviennent la cible d’une série d’attentats à la bombe (2).

L’invasion de l’Irak va de pair avec une authentique hystérie guerrière aux Etats-Unis. La politique à l’égard de Cuba en subit le contre-coup. En effet des voix s’élèvent aux Etats-Unis pour envahir Cuba après l’Irak (3). En Floride des groupes paramilitaires s’entraînent ouvertement avec des armes lourdes en vue d’une future invasion (voir photo) (4).

Les groupes terroristes opèrent à partir de Miami. Ils sont souvent formés et entraînés par la CIA. Ils avaient été créés autrefois par les 1 % de Cubains partis à Miami, avec la collaboration des services de sécurité américains et le financement des pouvoirs publics. Ils sont encore toujours tolérés aujourd’hui.

Ils ne sont du reste pas seulement utilisés contre Cuba. Le super-terroriste Orlando Bosch qui commet avec Luis Posada Carriles l’attentat précité contre l’avion de ligne sert également dans l’Opération Condor (5). Il s’agit de l’opération CIA qui dans les années ’70 et ’80 du siècle dernier a soutenu toute une série de dictatures en Amérique du Sud dans la répression et les pratiques de torture contre tout ce qui était progressiste. Luis Posada Carriles est actif notamment dans la guerre des Contras au Nicaragua qui fit de dizaines de milliers de victimes innocentes. Bosch, tout comme Posada Carriles, est protégé par les autorités étatsuniennes. Posada Carriles coule toujours des jours heureux à Miami.

25 fois Paris

A Cuba le terrorisme n’est donc jamais bien loin. L’ensemble des attentats terroristes a tué 3.478 personnes, soit 25 fois le nombre de victimes des attentats de Paris. 2.099 ont été blessées ou mutilées ou sont restées invalides. (6).

Dans ces circonstances on pourrait s’attendre à une société militarisée avec une forte présence de bleu et de kaki dans les rues. On pourrait aussi s’attendre à ce que les autorités proclament régulièrement l’état d’urgence pour des semaines ou des mois, ou qu’elles mettent régulièrement à l’arrêt les transports publics, interdisent les compétitions sportives, ferment temporairement les écoles, suspendent en permanence les libertés, etc.

Mais ce n’est absolument pas le cas. Pas de tanks ni de véhicules militaires dans les rues, pas de tireurs d’élite ni de paramilitaires près des bâtiments publics, pas même lors de manifestations de masse comme le cortège annuel du 1er mai ou les visites papales. En de telles occasions des centaines de milliers de personnes se réunissent en un même lieu.

Ce n’est pas que Cuba prenne la menace terroriste à la légère ou lâche la bride aux terroristes potentiels, bien au contraire. Depuis ’59 la lutte anti-terroriste est la priorité absolue du gouvernement cubain. Les meilleures forces de tout le pays sont engagées dans la lutte contre le terrorisme. Mais l’approche est totalement différente de la « war on terror » comme nous l’avons sous Bush ou comme elle est est actuellement menée en France et en Belgique.

L’approche cubaine

Les révolutionnaires cubains ont parfaitement compris dès leur lutte de libération que les Etats-Unis ne toléreraient jamais un gouvernement progressiste, encore moins une révolution socialiste, dans leur arrière-cour. Ils savaient qu’après leur prise de pouvoir ils seraient aux prises pendant longtemps avec des agressions et une subversion venues de Washington. Fidel a dit à ce propos, quelque six mois avant la victoire, à l’occasion d’un bombardement sur un village de montagne : « Quand cette guerre prendra fin, une autre viendra pour moi, qui sera bien plus longue et plus grande, à savoir le combat contre eux [les Américains] » (7).

La lutte contre le terrorisme et la subversion est menée de deux manières à Cuba : en s’appuyant sur la population et en infiltrant les réseaux terroristes.

L’appui sur la population

En 1960, appuyés par la CIA, des contre-révolutionnaires opéraient dans les montagnes au centre de l’île. Pour les éradiquer le gouvernement n’envoya pas l’armée. En lieu et place, cent mille volontaires furent mobilisés, avec succès.

La même année Cuba connut des attentats à la bombe à La Havane et dans d’autres villes. A nouveau la population fut mobilisée pour écarter le terrorisme. Dans chaque quartier, un CDR (8) fut créé, un comité qui veillait à la sécurité du quartier. Ainsi naquit un grand système collectif de vigilance. Au fil des ans ces comités de quartier s’occupèrent également de problèmes sociaux ou économiques des habitants du quartier, santé publique (éradication de moustiques dangereux, collectes de sang …), organisation des élections, recyclage …

Cuba s’appuie également sur sa population pour défendre le pays d’une éventuelle invasion militaire. Aujourd’hui, aux côtés de l’armée régulière, le système défensif peut compter sur deux millions de Cubains qui sont sur le pied de guerre dans les 48 heures. Ces volontaires reçoivent un entraînement annuel et savent où aller s’armer le cas échéant.

L’infiltration

Une collaboration avec Washington n’était guère envisageable jusqu’à présent. Aussi ne restait-il qu’une seule option aux Cubains : l’infiltration. C’est précisément ce que les « Cuban Five », les Cinq de Cuba, ont accompli pendant les années ’90. Ils ont infiltré les groupes terroristes les plus violents en Floride afin de collecter le maximum d’informations et de pouvoir déjouer des attentats. Ils ont ainsi pu empêcher une bonne centaine d’attentats (9).

Ce genre d’infiltrations est tout sauf évident. Les terroristes ne sont pas des mauviettes et n’hésitent pas à assassiner renégats ou infiltrés. S’ils sont démasqués, les infiltrés risquent également de lourdes peines de prison aux Etats-Unis. C’est ainsi qu’en 2001 les Cinq agents anti-terroristes cubains furent condamnés collectivement à quatre fois la perpétuité plus 77 ans. L’ironie veut que cela se passait juste quelques mois après les attentats contre le World Trade Center à New York.

Lorsqu’en juillet 2004, lors d’une visite en prison, nous demandons à Gerardo Hernández, chef des Cinq, pourquoi il a accepté une mission aussi risquée, il sourit : « Je ne suis pas du tout une exception, vous savez » répond-il. « Si vous vous adressez à 10 Cubains pour faire ce genre de boulot dans l’intérêt de notre peuple, je suis sûr que 7 d’entre eux diront oui sans hésiter. Nous savons tous ce que c’est que perdre des amis ou des parents dans un attentat ».

Depuis le 17 décembre 2014 les USA ont entamé des démarches en vue d’une reprise des relations avec Cuba. Les Cinq sont libérés dans ce contexte, après 16 années de campagnes internationales (10). Mais jusqu’à présent la politique de déstabilisation et le blocus économique des Etats-Unis demeurent intacts.

Un autre regard

Dans les médias de masse l’image de Cuba est toujours négative. Le Cuba bashing est de bon ton. Certains faits sont amplifiés, d’autres sont systématiquement occultés ou criminalisés. S’il se produit à Cuba quelques arrestations administratives, cela devient vite une info internationale, alors que dans notre propre pays il y a des dizaines d’arrestations de ce genre chaque année. Inversement les informations traitent généralement le blocus économique – le plus long de l’Histoire – comme un détail, en supposant qu’elles le mentionnent. Pour vous donner une idée, en 55 ans le coût de ce blocus a atteint 11 fois le PNB (11). Pour la Belgique un tel calcul équivaudrait à 400 milliards d’euros et pour la France à 23.000 milliards d’euros. Difficile d’appeler ça un détail.

Le pire est qu’on ne parle jamais de la menace terroriste permanente. Cuba est considéré comme un pays normal, alors qu’il vit depuis 55 ans sous une menace terroriste permanente. Depuis les événements du vendredi 13 novembre nous savons maintenant pour la première fois ce que cela signifie. Une situation de ce genre bouleverse un pays. Pour la première fois nous sommes peut-être en état de nous représenter ce que qu’implique de vivre sous de telles conditions. Ce qui nous permettra peut-être de faire preuve d’une meilleure compréhension à l’égard de Cuba.

Cela nous incitera peut-être aussi à exiger de Washington qu’il en finisse une fois pour toutes avec les groupes terroristes sur son propre sol, plus précisément à Miami. Il n’est jamais mauvais de commencer à balayer devant sa porte.

Katrien Demuynck et Marc Vandepitte ont écrit plusieurs ouvrages sur Cuba.

Notes : (1) Les plans émanaient notamment de McNamara, Ministre des Affaires étrangères de l’époque. T. Diez Acosta : October 1962, The ‘Missile’ crisis as seen from Cuba. New York 2002, p. 86.

(2) Demuynck K. (ed.) : The incredible case of the Cuban Five. Evidence from the International Commission of Inquiry into the Case of the Cuban Five, Londres 2014, p. 39-51.

(3) Hans Hertell, ambassadeur US en République Dominicaine et proche de Bush a déclaré juste après la chute de Bagdad : “Les événements en Irak sont un signal positif et sont un bon exemple pour Cuba où la semaine dernière le régime de Fidel Castro a ordonné l’arrestation de plus de 80 citoyens pour leurs seules idées”. Jeb Bush, actuel candidat républicain à la présidence et frère de, déclarait à peu près au même moment : “Après notre succès en Irak, nous devons regarder vers notre voisin. Nous devons expliquer à nos frères d’Amérique latine et d’ailleurs qu’un régime qui ne respecte pas les droits de l’homme ne peut pas être maintenu”. Cf resp. El Expresso, 13 avril 2003 et www.americas.org/news/nir/20....

(4) Sun Sentinel 6 avril 2003.

(5) Stella Calloni. Operación Condór. Pacto Criminal, La Havane, 2005.

(6) cf http://www.theguardian.com/us-news/...

(7) Dans une lettre à Celia Sánchez in Suárez Pérez E. & Caner Román A. (éd.) : De cinco palmas a La Habana, La Havane 1998, p. 143.

(8) CDR : Comité de Defensa de la Revolución.

(9) Sur les Cinq de Cuba voir : http://www.cubanismo.net/cms/fr/art...

(10) cf http://cubanismo.net/cms/fr/campagn...

(11) cf http://www.elnuevodia.com/noticias/... Le PNB est ce qu’un pays produit de richesses en un an (biens et services).

Source originale : De Wereld Morgen

Traduction du néerlandais : Anne Meert pour Investig’Action.

par Katrien De Muyck et Marc Vandepite 30 Novembre 2015

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24/11/2015

L’Argentine se donne à la droite libérale

argentine_1.jpg

Le très libéral Mauricio Macri a remporté dimanche le second tour de l'élection présidentielle en Argentine. Sa victoire est une rupture économique et sociale, mais aussi diplomatique puisqu’elle devrait augurer un rapprochement vers Washington.

Le maire de Buenos Aires Mauricio Macri, 56 ans, totalise 52,11% des voix, contre 47,89% à son adversaire Daniel Scioli, candidat de la coalition de gauche au pouvoir, qui a admis sa défaite. La présidente Cristina Kirchner, à la tête du pays depuis 2007 après avoir succédé à son mari, ne pouvait pas se présenter pour un 3e mandat consécutif, selon la constitution.
Cet héritier d’un empire économique bâti par son père a soudé une coalition autour du parti de droite qu'il a fondé, le PRO, en associant notamment les radicaux du centre de l'UCR, un parti historique diminué.
Il promet une rupture libérale violente avec la politique économique protectionniste et encadrée menée par les gouvernements de Nestor (2003-2007) et Cristina Kirchner.

Les économistes de sa coalition préconisent une suppression du contrôle de l'accès aux devises étrangères, de la limitation des importations ou des barrières douanières, comptent rompre avec la surévaluation du peso argentin et régler le conflit sur la dette avec des "fonds vautours". De quoi ravir Washington. D’autant plus que l’Argentine devrait se détourner des nations progressistes d’Amérique Latine pour rentrer dans le giron économique des Etats-Unis.

Daniel Scioli, était lui soutenu par la coalition de gauche de la présidente Cristina Kirchner. Il se présentait comme le défenseur des plus démunis, des aides sociales accordées par l'administration Kirchner, et s'érigeait en rempart "contre le capitalisme sauvage" incarné par Mauricio Macri. Les péronistes ont appelé les électeurs à "voter pour préserver leur avenir". "Pensez à votre salaire, à votre travail".  Cristina Kirchner avait appelé es Argentins à "voter avec leur mémoire, mais pas par intérêt partisan, ce serait dommage de faire un pas en arrière après toutes les avancées" de l'administration Kirchner. "Souvenez-vous dans quel état se trouvait l'Argentine en 2003 (après la crise économique, ndlr), et où en est le pays aujourd'hui", faisant référence aux 10 années de croissance forte que le pays a connu sous son administration.

Sans majorité à la chambre des députés, ni au Sénat, Mauricio Macri devra tisser des alliances pour gouverner l'Argentine, avec une opposition péroniste détenant la majorité absolue au Sénat et une majorité relative de députés. 

Lundi, 23 Novembre, 2015
Humanite.fr
 
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18/10/2015

Femmes à Cuba : la Révolution émancipatrice

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Introduction 

            Le triomphe de la Révolution cubaine a engendré le plus remarquable bouleversement politique, économique et social de l’histoire de l’Amérique latine. Dès 1959, les nouvelles autorités dirigées par Fidel Castro ont placé les déshérités, en particulier les femmes et les personnes de couleur, principales victimes des discriminations inhérentes à une société patriarcale et ségrégationniste, au centre du projet réformateur.

La Révolution « des humbles, par les humbles et pour les humbles [1] » devait jeter les bases d’une nouvelle ère égalitaire, débarrassée des affres des injustices liées à l’histoire et aux structures sociales du pays.
           cubasanté.jpg La femme cubaine a été la priorité immédiate du gouvernement révolutionnaire avec la création, dès 1960, de la Fédération de femmes cubaines (FMC), dont la présidente fut Vilma Espín Dubois, militante pleinement engagée contre la dictature du général Fulgencio Batista et épouse de Raúl Castro. Quel était le statut de la femme au triomphe de la Révolution ? Quelles mesures concrètes ont été adoptées pour diffuser et appliquer les idées de l’égalité des droits et des opportunités entre les hommes et les femmes, et mettre un terme aux préjugés et aux stéréotypes culturels ?
Trois axes structureront cette réflexion. Dans un premier temps, une attention particulière sera accordée à la place de la femme avant le triomphe de la Révolution. Ensuite, il conviendra d’analyser les mesures prises par le nouveau pouvoir pour permettre à ce secteur de la société d’atteindre l’émancipation définitive et la pleine citoyenneté. Enfin, au-delà des grandes déclarations de principes, un regard sera porté sur son statut aujourd’hui pour évaluer son intégration dans la vie politique, économique et sociale du pays. 

1.      La place de la femme avant le triomphe de la Révolution

cubafemme1.jpgSous le régime militaire de Fulgencio Batista de 1952 à 1958, la femme cubaine, soumise au carcan d’une société patriarcale, ne représentait que 17% de la population active et recevait une rémunération sensiblement inférieure à celle de l’homme pour un emploi équivalent. Cantonnée au rôle de mère au foyer chargée des tâches domestiques, sous la férule de l’omnipotence du mari, première victime de l’illettrisme qui frappait une grande partie de la population, les perspectives d’avenir étaient plutôt sombres pour la femme cubaine. Ainsi, sur les 5,8 millions d’habitants, avec un taux de scolarisation de seulement 55% pour les enfants de 6 à 14 ans, plus d’un million d’enfants n’avaient pas accès à l’école et étaient cantonnés au foyer familial, à la charge de la mère. L’analphabétisme touchait 22% de la population, soit plus de 800 000 personnes, dont une majorité de femmes [2].


Malgré l’obtention du droit de vote dès 1934, sous le gouvernement progressiste de Ramón Grau San Martín émanant de la Révolution populaire de 1933, le rôle de la femme dans la vie politique a été très limité. Ainsi, de 1934 à 1958, seules 26 femmes ont occupé un poste législatif avec 23 députées et 3 sénatrices [3].
En revanche, la femme cubaine a joué un rôle-clé dans la lutte insurrectionnelle contre la dictature de Fulgencio Batista, notamment au travers d’organisations telles que le Frente Cívico de Mujeres Martianas et las Mujeres Oposicionistas Unidas. Les femmes cubaines ont intégré la guérilla du Mouvement 26 Juillet de Fidel Castro en créant en septembre 1958 le peloton militaire « Mariana Grajales », exclusivement féminin, dans la Sierra Maestra. Plusieurs figures féminines, telles que Celia Sánchez, Melba Hernández, Haydée Santamaría ou Vilma Espín, entre autres, ont émergé du mouvement révolutionnaire contre le régime militaire [4]. Néanmoins, les revendications de ces militantes n’étaient pas purement féministes. Comme l’a souligné Maruja Iglesias, dirigeante du Frente Cívico de Mujeres Martianas, « nous ne luttions pas pour les droits de la femme. Nous luttions pour les droits de tous [5] ». 

2.      Premières mesures du gouvernement révolutionnaire

        cubamedecins1.jpgDepuis le triomphe de la Révolution en 1959, dont les fondements idéologiques se trouvent dans la pensée du Héros national José Martí, l’Etat cubain a fait de l’émancipation de la femme l’une de ses principales priorités. Dès son premier discours prononcé le 1er janvier 1959 à Santiago de Cuba, quelques heures après la fuite de Batista, Fidel Castro avait fait allusion à la situation de la femme et avait rappelé que la mission du processus révolutionnaire était de mettre un terme à la subordination sociale des plus opprimés :

Il s’agit d’un secteur de notre pays qui a besoin d’être libéré, car il est victime de la discrimination au travail et dans d’autres aspects de la vie […] Quand l’on jugera notre révolution dans les années futures, l’une des questions pour lesquelles nous serons jugés sera la manière dont nous aurons résolu, dans notre société et notre patrie, les problèmes de la femme, même s’il s’agit d’un des problèmes de la révolution qui requièrent le plus de ténacité, le plus de fermeté, le plus de constance et d’effort [6].

La femme cubaine a été la principale bénéficiaire des conquêtes sociales et populaires. Ainsi, dès 1960, la Fédération des femmes cubaines (FMC) fondée par Vilma Espín, a vu le jour afin de défendre les mêmes droits pour tous et mettre un terme aux discriminations. La femme devait enfin occuper l’espace social qui lui correspondait et contribuer pleinement à l’édification de la nouvelle Patrie. Fidel Castro en avait souligné l’importance : « La femme cubaine, doublement humiliée et reléguée par la société semi-coloniale avait besoin de sa propre organisation, que représenterait ses intérêts spécifiques et qui travaillerait pour obtenir la plus grande participation dans la vie économique, politique et sociale de la Révolution [7] ». La FMC compte aujourd’hui plus de 4 millions de membres.
        Vilma Espín Dubois a joué un rôle fondamental dans l’émancipation de la femme cubaine. Militante révolutionnaire, elle a intégré le Mouvement 26 Juillet et a été membre de la Direction nationale. En 1958, Vilma Espín a rejoint le Second Front Oriental Frank País, devenant l’une des premières femmes à participer à la guérilla. Après le triomphe de la Révolution, elle a dédié sa vie à la lutte des femmes cubaines pour l’égalité, jusqu’à sa disparition en 2007. Elle a ainsi présidé la Commission nationale de prévention et d’attention sociale, la Commission de l’enfance, la jeunesse et de l’égalité des femmes au sein du Parlement cubain [8].
        L’une des premières tâches de la FMC a été de lutter contre la prostitution, nécessité vitale pour près de 100 000 femmes de la Cuba prérévolutionnaire, et de les impliquer dans la construction de la nouvelle société. Avec la disparition des conditions économiques et sociales responsables de l’exploitation sexuelle des femmes, la réadaptation sociale a été d’autant plus facilitée par l’existence d’une structure fédérative féminine.
        cubaecole.jpgSuivant l’adage de José Martí « être cultivé pour être libre », Cuba a lancé en 1961 une grande campagne d’alphabétisation qui a permis à toutes les catégories de la société, en particulier aux femmes – et surtout aux femmes de couleur –, de bénéficier de ce progrès social qui ouvrait la voie vers l’égalité. Plus de 10 000 écoles primaires ont été créées la même année, soit plus que durant les soixante ans de république néocoloniale. Les résultats furent immédiats : plus de 700 000 personnes, dont 55% de femmes, ont été alphabétisées en douze mois et l’analphabétisme fut réduit à 3,8%. En 1961, Cuba a été déclarée par l’UNESCO « premier territoire libre d’analphabétisme », fait unique en l’Amérique latine et La Caraïbe à l’époque. Dès 1961, Cuba a créé les cercles infantiles destinés à permettre aux mères cubaines d’avoir accès à la formation, au travail et de participer à la vie économique du pays [9].
        Cuba a ensuite mis en place un arsenal constitutionnel et législatif destiné à promouvoir les droits des femmes et l’égalité pour tous. Les articles 41 et 42 de la Constitution inscrivent dans le marbre l’égalité des droits entre femmes et hommes et sanctionnent toute « discrimination pour motif de race, couleur de peau, sexe, origine nationale, croyances religieuses ou toute autre atteinte à la dignité humaine [10] ». La Loi 62 du Code pénal (article 295) typifie comme délit, passible d’une peine de deux ans de prison, toute atteinte au droit à l’égalité [11]. Les femmes ont ainsi accès à tous les postes de la fonction publique et à toutes les hiérarchies des forces armées [12].
        Au niveau international, Cuba a également joué un rôle d’avant-garde dans la promotion des droits des femmes. Ainsi, l’île de la Caraïbe est le premier pays d’Amérique latine à avoir légalisé l’avortement en 1965. Seules deux nations du continent, le Guyana en 1995 et l’Uruguay en 2012, ont suivi l’exemple de Cuba en accordant le droit imprescriptible aux femmes de disposer de leur propre corps. De la même manière, Cuba est le premier pays au monde à avoir signé la Convention sur l’Elimination de toutes les formes de discrimination contre la femme, et le second à l’avoir ratifiée. 

3.      La femme à Cuba aujourd’hui

       cuba-elecciones-press1.jpg La santé et le bien-être de la femme cubaine ont été érigés en priorités nationales depuis l’avènement de la Révolution cubaine en 1959, comme l’illustrent les indicateurs dans ce domaine. Ainsi, l’espérance de vie des femmes est de 80 ans, supérieure de deux ans à celle des hommes, et elle est similaire à celle des nations les plus développées. Le taux de mortalité infantile est de 4,6 pour mille, soit le plus bas du continent américain – Canada et Etats-Unis compris – et du Tiers-monde. Le taux de mortalité maternelle est de 0,02%, soit le plus bas d’Amérique latine et du Tiers-monde. Le taux de fécondité (nombre d’enfants par femme) est de 1,5 selon la Banque mondiale, c’est-à-dire le plus bas d’Amérique latine, ce qui n’est pas sans poser un problème de renouvellement générationnel [13].
        D’un point de vue légal, l’article 59 du Code du travail protège spécifiquement les mères cubaines. Il stipule que « l’employeur doit créer et maintenir des conditions de travail pour la femme, en prenant en compte sa participation dans le processus du travail et sa fonction sociale comme mère ». Ainsi, les mères cubaines ont la possibilité de s’occuper à temps plein de leur nouveau-né tout en percevant l’intégralité de leur salaire un mois et demi avant l’accouchement et trois mois après la naissance de l’enfant. Le congé peut durer un an avec une rémunération égale à 60% de leur salaire. Au bout d’un an, elles sont automatiquement réintégrées dans leur travail. Par ailleurs, le droit du travail cubain permet à la femme de partir à la retraite à 60 ans ou après avoir cotisé pendant 30 annuités. En guise de comparaison, la femme française doit avoir cotisé pendant 42 annuités pour avoir la possibilité de prendre une retraite à taux plein.
        Les femmes représentent près de 60% des étudiants du pays et plus de 65% d’entre elles sont diplômées de l’enseignement supérieur. Au niveau professionnel, depuis 1980, les femmes actives disposent en moyenne d’un niveau de formation supérieur à celui des hommes actifs. Si les femmes ne représentent que 44% de 5,5 millions de personnes qui composent la population active du pays, chiffre qui illustre les efforts encore à réaliser dans le voie de l’égalité pleine [14], en revanche, elle constituent 66,4% des techniciens et professionnels du pays de niveau moyen et supérieur (enseignants, médecins, ingénieurs, chercheurs, etc.) et 66% des fonctionnaires civils (contre 6,2% avant 1959) [15].
        De la même manière, aujourd’hui, à travail égal, la législation cubaine impose que le salaire de la femme soit strictement le même que celui de l’homme. En France, selon l’INSEE, à emploi égal, le salaire de la femme est inférieur de 28% à celui de l’homme [16]. Aux Etats-Unis, le salaire de la femme ne représente que 80% de celui de l’homme [17].
        A Cuba, les femmes occupent 46% des postes de direction dans le secteur économique (contre 2% avant le triomphe de la Révolution). A titre comparatif, en France, parmi les 40 sociétés du CAC 40, seules cinq sont dirigées par des femmes [18].  Au niveau administratif et judiciaire, les femmes cubaines représentent 66% des membres de l’inspection des Finances et du Tribunal suprême et 78% des fonctionnaires du Parquet [19].
        La femme cubaine est pleinement intégrée dans la vie politique du pays. Les statistiques dans ce domaine sont révélatrices. Ainsi, des 31 membres du Conseil d’Etat cubain, 13 sont des femmes, soit 41,9%. Au niveau exécutif, il y a 8 femmes ministres sur 34, soit 23,5%. Au Parlement cubain, sur les 612 députés, 299 sont des femmes, soit 48,66%. En France, le taux de femmes parlementaires (Assemblée nationale + Sénat) est de 26%. Cuba occupe le troisième rang mondial du plus grand pourcentage de femmes élues députés. A titre indicatif, les Etats-Unis occupent le rang 80.
        Une femme, María Mari Machado, occupe la vice-présidence du Parlement cubain. Au niveau des Assemblées provinciales, sur les 1268 élus, 48,36% sont des femmes. Les femmes cubaines président 10 des 15 Assemblées provinciales du pays, soit 66,6%, et occupent la vice-présidence dans 7 d’entre elles, soit 46,6%. Sur les 115 membres du Comité Central du Parti Communiste cubain, 49 sont des femmes, soit 42,6%. La secrétaire du Parti communiste pour la province de La Havane, la plus importante du pays, est Lázara Mercedes López Acea, une femme de couleur née en 1964. Elle est également vice-présidente du Conseil d’Etat et du Conseil des Ministres. Ces résultats sont d’autant plus remarquables qu’il n’existe aucune loi à Cuba obligeant à la parité pour les postes politiques.
        Par ailleurs, sur les 16 dirigeants syndicaux provinciaux de la Confédération des travailleurs cubains (CTC), 9 sont des femmes, soit 56,25%.
       cubanepal.jpg Au niveau de la diplomatie, Cuba est représentée par des femmes dans pas moins de 47 pays. Au Ministère des Affaires étrangères, plus de 40% des fonctionnaires sont des femmes et plusieurs d’entre elles occupent des postes de vice-ministre. Josefina Vidal, Directrice du Département des Etats-Unis au sein du Ministère cubain des Affaires étrangères, est chargée de mener les négociations avec Washington dans le processus historique de normalisation des relations bilatérales annoncé par les Présidents Barack Obama et Raúl Castro le 17décembre 2014 [20].
        A Cuba, la pratique sportive est considérée comme étant indispensable au développement physique et intellectuel des citoyennes et des citoyens, qui ont accès gratuitement à toutes les installations et infrastructures du pays. L’Institut national des sports a mis en place tout un éventail de programmes pour toutes les catégories de la population et toutes les générations. Les résultats sont édifiants : pour ce qui est du sport de haut niveau, la femme cubaine occupe une place de premier choix et Cuba est le pays d’Amérique latine qui dispose – en chiffres absolus – du plus grand nombre de médaillées olympiques avec 49 titres [21].
        Les Nations unies, par le biais de la Commission économique pour l’Amérique latine et la Caraïbe (CEPAL), ont salué la politique de l’Etat cubain en faveur des femmes. Alejandrina Germán, présidente de Conférence régionale sur la femme et également Ministre de la femme de la République dominicaine, a souligné que Cuba a toujours joué un rôle avant-gardiste dans la promotion et la défense des droits des femmes, rappelant que l’égalité des genres dépendait d’abord et avant de la volonté politique des dirigeants [22].

        Si la prostitution a disparu en tant que réalité sociale institutionnalisée, il convient de noter la résurgence de ce phénomène à partir des années 1990, avec la crise économique, la recrudescence des sanctions imposées par les Etats-Unis et l’ouverture du pays au tourisme de masse. Le Centre d’éducation sexuelle, dirigée par Mariela Castro Espín, fille de l’actuel Président Raúl Castro et de la fondatrice de la FMC Vilma Espín, joue un rôle important, basé sur la prévention et la persuasion, dans la lutte contre ce fléau [23].
        Cuba a mis en place un arsenal législatif et juridique dissuasif contre la violence de genre. Le Groupe national de prévention et d’attention de la violence familiale, entité transversale multisectorielle et pluridisciplinaire qui inclut les Ministères de l’Education, de la Santé, de l’Intérieur, de la Justice, les services du Procureur général de la république, de la Médecine légale, du Centre national d’éducation sexuelle, de l’Université de La Havane, du Tribunal Suprême et de l’Institut de Radio et Télévision, est chargé de la lutte contre la violence faite aux femmes. Le Code pénal sanctionne sévèrement ce type d’atteinte à l’intégrité physique et psychologique et la violence conjugale est considérée comme étant une circonstance aggravante.
       Si les comportements machistes, sexistes et discriminatoires, hérités de cinq siècles de société patriarcale avec ses obstacles intrinsèques d’ordre culturel, idéologique et psychologique, persistent toujours dans la Cuba d’aujourd’hui et constituent encore un obstacle à l’émancipation pleine et entière de la femme, néanmoins, celle-ci joue indéniablement un rôle prépondérant dans la société et participe pleinement au développement du pays.

Conclusion

cuba,femmes,salim lamraniLa Révolution cubaine a incontestablement ouvert la voie vers l’affranchissement de la femme. Tous ses droits, qu’ils soient économiques, sociaux, culturels, civils ou politiques, sont garantis par la Constitution et la femme a été la principale bénéficiaire du processus de transformation sociale initiée en 1959.
        Reléguée à un rang social subalterne dans la Cuba néocoloniale, elle est devenue un sujet actif qui a grandement contribué à l’édification d’une société nouvelle basée sur l’égalité et la justice sociale. La femme cubaine joue désormais un rôle essentiel dans la vie politique, économique, sociale et culturelle du pays.
        « Toute la patrie se trouve dans la femme », disait, à juste titre, José Martí. Néanmoins, si les normes juridiques existantes permettent l’épanouissement et la réalisation de la femme à Cuba, si les indicateurs et les statistiques restent exceptionnels pour une nation du Tiers-Monde et si la femme cubaine n’a rien à envier à ses paires des pays les plus développés, il reste encore certains obstacles d’ordre culturel, psychologique et idéologique à franchir dans le chemin sinueux vers l’émancipation totale.

Salim Lamrani

Docteur ès Etudes Ibériques et Latino-américaines de l’Université Paris IV-Sorbonne, Salim Lamrani est Maître de conférences à l’Université de La Réunion, et journaliste, spécialiste des relations entre Cuba et les Etats-Unis.

Son nouvel ouvrage s’intitule Cuba, parole à la défense !, Paris, Editions Estrella, 2015 (Préface d’André Chassaigne).

Contact : lamranisalim@yahoo.fr ; Salim.Lamrani@univ-reunion.fr

Page Facebook : https://www.facebook.com/SalimLamraniOfficiel

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[1] Fidel Castro, “Discurso pronunciado por Fidel Castro Ruz, Presidente de Dobla República de Cuba, en las honras fúnebres de las víctimas del bombardeo a distintos puntos de la república, efectuado en 23 y 12, frente al cementerio de Colón, el día 16 de abril de 1961”, República de Cuba. http://www.cuba.cu/gobierno/discursos/1961/esp/f160461e.html (site consulté le 8 mars 2015).

[2] Acela Caner Román, “Mujeres cubanas y el largo camino hacia la libertad”, Biblioteca Nacional José Martí, août 2004. http://librinsula.bnjm.cu/1-205/2004/agosto/31/documentos/documento104.htm(site consulté le 15 novembre 2014)

[3] Joseba Macías, « Revolución cubana: Mujer, Género y Sociedad Civil”, Viento Sur. http://www.vientosur.info/documentos/Cuba%20%20Joseba.pdf (site consulté le 15 novembre 2014)

[4] Ibid.

[5] Ibid.

[6] Fidel Castro Ruz, “Discurso pronunciado por el Comandante Fidel Castro Ruz, en el Parque Céspedes de Santiago de Cuba”, República de Cuba, 1er janvier 1959. http://www.cuba.cu/gobierno/discursos/1959/esp/f010159e.html (site consulté le 18 avril 2015).

[7] Acela Caner Román, “Mujeres cubanas y el largo camino hacia la libertad”, Biblioteca Nacional José Martí, op. cit.

[8] Federación de Mujeres Cubanas, « Dossier Vilma Espín ». http://www.mujeres.co.cu/dossiervilma/HTML/01.html (site consulté le 18 avril 2015).

[9] Acela Caner Román, “Mujeres cubanas y el largo camino hacia la libertad”, Biblioteca Nacional José Martí, op. cit.

[10] Constitución de la República de Cuba, 1976, Artículo 41 & 42.

[11] Código Penal Cubano.

[12] Dalia Isabel Giro López, “Mujeres haciendo Revolución”, Cuba Defensa, 20 août 2013. http://www.cubadefensa.cu/?q=node/2158 (site consulté le 18 avril 2015) ; Sonia Regla Pérez Sosa, « Homenaje a las mujeres de las FAR », Cuba Defensa, 5 mars 2015. http://www.cubadefensa.cu/?q=homenaje%20mujeres%20FAR (site consulté le 18 avril 2015).

[13] Banque mondiale, “Tasa de fertilidad, total (nacimientos por cada mujer)”, 2014. http://datos.bancomundial.org/indicador/SP.DYN.TFRT.IN/countries (site consulté le 8 mars 2015).

[14] Mariela Pérez Valenzuela, “Mujer cubana: una fortaleza en la economía nacional”, Federación de Mujeres Cubanas. http://www.mujeres.co.cu/714/beijing1.html (site consulté le 15 novembre 2014)

[15] Mujeres, « Cuba en el CEDAW ». http://www.mujeres.co.cu/cedaw/texto/01.html (site consulté le 15 novembre 2014)

[16] Thomas Morin & Nathan Remila,  « Le revenu salarial des femmes reste inférieur à celui des hommes », INSEE, http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?ref_id=ip1436 (site consulté le 15 novembre 2014)

[17] Le Figaro, « La crise pousse les Américaines à travailler », 18 novembre 2009. http://www.lefigaro.fr/emploi/2009/11/18/01010-20091118ARTFIG00628-la-crise-pousse-les-americaines-a-travailler-.php (site consulté le 15 novembre 2014)

[18] Camille Boulate, “Les cinq femmes à la direction générale du CAC 40”, Les Echos, 7 mars 2013.  http://business.lesechos.fr/directions-generales/les-quatre-femmes-a-la-direction-generale-du-cac40-5300.php (site consulté le 15 novembre 2014)

[19] Federación de Mujeres Cubanas, “Cubanas en cifras”, 2014. http://www.mujeres.co.cu/715/plegable2.pdf (site consulté le 15 novembre 2014), p. 7-9.

[20] Salim Lamrani, « Acercamiento Cuba-Estados Unidos : perspectivas y obstáculos », Al Mayadeen, 23 février 2015. http://espanol.almayadeen.net/Study/uJUAe1pzFUiV8aRIAF9FTA/acercamiento-cuba-estados-unidos--perspectivas-y-obst%C3%A1culos (site consulté le 8 mars 2015).

[21] Federación de Mujeres Cubanas, “Cubanas en cifras”, novembre 2014. http://www.mujeres.co.cu/715/plegable2.pdf(site consulté le 8 mars 2015). p. 8, 9.

[22] Margen Borges, « Destacan en Cepal política de Estado cubano a favor de mujeres », Federación de Mujeres Cubanas, 2014. http://www.mujeres.co.cu/articulo.asp?a=2014&num=714&art=51 (site consulté le 15 novembre 2014)

[23] Centro Nacional de Educación Sexual. http://www.cenesex.org/(site consulté le 15 novembre 2014)

11:14 Publié dans AL-Pays : Cuba, Amérique Latine, Culture, Société | Tags : cuba, femmes, salim lamrani | Lien permanent | Commentaires (0) |  Imprimer | |  Facebook | | | | Pin it! | | |  del.icio.us | Digg! Digg

27/07/2015

Cuba : une dictature ?

cubaelection.jpg

Par André Chassaigne, député PCF du Puy de Dome, Président du groupe France Cuba à l'assemblée nationale

chassaignermc.jpgJe participais sur RMC, ce mercredi 22 juillet, au « Conseil des Grandes Gueules » qui réunit, chaque mercredi, de 12 h à 13 h, trois invités politiques pour débattre de l’actualité du jour à la sortie du Conseil des Ministres.

Après l’habituel échange sur les affaires courantes (cette semaine: agriculteurs en colère, interdiction du flashball, buralistes et paquets de cigarettes neutres) j’ai dû commenter, suivant le déroulé habituel de l’émission, une «déclaration choc de l’actualité» qui m’était réservée: Obama se réjouissant du rétablissement des relations diplomatiques des Etats-Unis avec Cuba.

Immédiatement m’a été posée «la question qui tue : «Est-ce que Cuba est une dictature?».

Sans hésiter, j’ai répondu «non, absolument pas».

Si la question ne m’a pas «tué», la réponse a quant à elle fait l’effet d’une bombe à fragmentation, d’abord dans le studio, et ensuite paraît-il sur certains réseaux sociaux.

Mais enfin, André Chassaigne, comment pouvez-vous dire une chose pareille».

Ces quelques mots du journaliste, sincèrement choqué, ont suffi pour que je mesure les dégâts faits dans les têtes par la propagande distillée depuis des années par les forces libérales et leurs porte-voix médiatiques.

Une bataille ininterrompue qui a secrété au fil du temps une vision complètement déformée de la réalité cubaine, avec l’objectif de déconsidérer aux yeux du monde l’édification d’une société nouvelle et d’un état souverain par un peuple de 11,2 M d’habitants, et sur une île si proche des Etats-Unis. : Face à la conviction, souvent de bonne foi, que le peuple cubain est sous le joug d’une dictature familiale le maintenant dans la misère, il faut donc prendre le temps d’expliquer ce qu’il en est.

Rappeler tout d’abord le contexte particulier qui a pu conduire, ce que je n’ai pas nié, à des atteintes aux libertés :

- Les 4 siècles de colonialisme et la lutte historique pour l’indépendance de l’île, de la guerre contre l’occupant espagnol à sa vassalisation, dès 1898, par les Etats-Unis qui n’ont jamais pu admettre que Cuba sorte de sa sphère d’influence, jusqu’à occuper illégalement l’espace stratégique que représente la baie de Guantanamo.

- Le processus révolutionnaire dans un pays qui avait été rongé par l’exploitation et l’injustice, avec une détermination et une exigence d’unité qui ont conduit au rôle dirigeant du Parti et à la présidentialisation du système politique, en lien avec la mobilisation populaire pour maintenir la souveraineté de Cuba.

- Une île des Caraïbes à 150 km seulement de la plus grande puissance capitaliste et impérialiste, qui a multiplié agressions militaires, attentats contre Fidel Castro, actions terroristes et plans de déstabilisation.Quant aux difficultés économiques et à la pauvreté de la population, il faut aussi prendre en compte les conditions dans lesquelles Cuba a dû se développer

- Un blocus économique et financier, en violation du droit international, que les Etats-Unis n’ont eu de cesse de renforcer, destiné à asphyxier l’économie et tout développement social pour donner «le coup de grâce» à la révolution cubaine.

- Les conséquences de la disparition de l’Union Soviétique avec un effondrement de 33 % du PIB cubain en 1990, dû à la pénurie de pétrole et de pièces de rechanges ainsi qu’à l’arrêt de multiples investissements.

- Le coût des aléas climatiques, qui se chiffre à plusieurs milliards après un cyclone (10 milliards de dollars pour la seule année 2008 sur un PIB de 60 milliards).

Et surtout, il faut souligner, dans ce contexte, les résultats malgré tout remarquables de la révolution cubaine. Loin d’être exhaustif, j’en retiens trois :

cubaechap.jpg- Le parti pris de la jeunesse et des personnes âgées, avec une politique d’éducation universellement reconnue et des résultats exemplaires en matière de santé.

- La production agricole qui se développe dans le respect de l’environnement, tout en enregistrant désormais une forte croissance après des années catastrophiques.

- Au risque de surprendre, et malgré ses imperfections, je citerai aussi une pratique démocratique qui bouscule notre vision figée du modèle d’une «démocratie occidentale» conduisant à l’alternance de grands partis défendant l’ordre libéral et au renoncement de la population par une abstention massive.

Les arguments ne manquent donc pas pour ceux qui connaissent vraiment Cuba.

Mais si ces explications parviennent à ébranler, elles ne suffisent pas toujours à convaincre.La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil» écrivait René Char.

Il faut donc être lucide sur l’état actuel de Cuba, ne rien cacher des réalités et donc en aucun cas occulter les erreurs et les échecs.

Raùl Castro lui-même a maintes fois exprimé sa volonté «d’éradiquer les erreurs commises en plus de cinquante ans depuis le 1er janvier 1959, et les nouvelles qui peuvent se produire à l’avenir».

Certes, la critique est plus difficile à exprimer pour l’observateur extérieur que je suis sans s’ériger en donneur de leçons !

Pour autant, il faut bien parler de la bureaucratie paralysante au service d’une centralisation excessive, de l’absence de motivations due à un collectivisme stérilisant les énergies, des difficultés à se nourrir et de la réalité d’un quotidien faisant de la débrouille un sport national, de cette obsession des autorités qui fait de tout opposant un espion américain, d’un culte excessif des figures légendaires que sont Fidel Castro et davantage encore Che Guevara.

Car, dire aussi ces réalités permet de chercher le pourquoi, d’analyser et réfléchir aux évolutions possibles, et au final de mieux comprendre les choix actuels du pouvoir cubain. Je pense plus particulièrement à «l’actualisation du modèle économique» mise en chantier en 2011, avec des réformes murement réfléchies, engagées «sin prisa, pero sin pausa »(sans précipitation mais sans pause), et une évaluation permanente de leur effet sur le mieux vivre de l’ensemble de la population.

L’actualité nous conduit aussi à nous interroger sur la prédiction largement admise que le régime s’écroulera dès que les Américains et leurs dollars mettront à nouveau les pieds sur l’île, pourrissant de l’intérieur la «pureté révolutionnaire».

Le risque n’est en effet pas à écarter quand on connaît la définition de la liberté et de la conception du bonheur des peuples, portée par les banques et les entreprises américaines !

C’est la perspective d’une île livrée à un capitalisme conquérant, d’une jeunesse cubaine se jetant dans le miroir aux alouettes de la société marchande, de dirigeants se reconvertissant comme tant d’apparatchiks communistes après l’effondrement du bloc soviétique.

Si j’ai conscience des difficultés à s’adapter à une situation nouvelle, je ne m’associe pas à cette chronique d’une mort annoncée.

La société cubaine d’aujourd’hui est construite sur des bases solides. L’éthique de ses dirigeants et la maturité du peuple cubain génèrent une intelligence collective pas prête d’être balayée par les vents de l’ouest venus du grand voisin yankee!

Dans la nouvelle phase du développement cubain, au cœur de l’affrontement idéologique des systèmes politiques, la «main invisible» du marché et le mécanisme de rentabilité maximale des capitaux ne seront pas en terrain conquis.

Dans cette évolution du monde et le constat de l’échec patent, malgré ses multiples recyclages, de la vieille théorie économique libérale, Cuba dispose d’un atout appréciable : elle n’est pas isolée.

Les gouvernements progressistes latino-américains ont initié des politiques qui valorisent un nouveau type de développement où l’humain, la souveraineté nationale et la coopération réduisent le rôle du marché au profit d’un nouvel ordre économique et social.

A l’heure d’une intégration européenne dévastatrice pour les peuples et la souveraineté des états, l’ALBA (Alternativa Bolivariana para las Americas) fait la preuve que des voies de coopération d’un type nouveau, équilibré et solidaire sont possibles, à l’opposé de l’intégration libérale. En s’attaquant à une dictature, bien réelle celle-ci, celle de l’argent, ils nous ouvrent un chemin…

Article publié sur le blog d'André Chassaigne

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11:06 Publié dans AL-Pays : Cuba, Amérique Latine, Politique | Tags : andré chassaigne, cuba, médias | Lien permanent | Commentaires (0) |  Imprimer | |  Facebook | | | | Pin it! | | |  del.icio.us | Digg! Digg