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15/04/2016

Cuba dans le regard d’une jeune femme

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Cuba dans le regard d'une jeune femme Quelques-unes répondent timidement. D’autres n’attendent pas qu’on leur donne la parole pour se lancer. Car elles se sentent toutes maîtresses de Cuba et de son destin. Certaines ont davantage de préoccupations, et d’autres sont plus optimistes. Mais leur point commun réside dans ce qu’elles attendent de demain et dans le fait que cet avenir est lié à l’essence de la terre qui les a vues naître.

Elles répondent en fonction de leur situation. Car les jeunes filles qui portent l’uniforme bleu et vont encore au pré-universitaire [équivalent du lycée] ne semblent pas encore très enclines à commenter leurs projets d’avenir. Elles limitent leurs préoccupations sociales à ce qui se dit sur le sujet dans les amphithéâtres, pendant les cours ou à ce qu’elles entendent à la maison.

Évidemment, il y a des exceptions, mais la plupart des jeunes étudiantes de ce niveau avouent qu’à ce stade de leur vie, elles se focalisent plus sur les relations avec leurs amis, l’angoisse d’avoir de bons résultats scolaires et les premières histoires d’amour. «Pour les jeunes autour de moi, c’est l’apparence personnelle qui est la première préoccupation, et le fait d’avoir accès à la technologie,» dit Patricia Fernández, 16 ans, qui suit les cours de l’enseignement pré-universitaire.

Daniela Acuña est un peu contrariée par les transports en ville et par les difficultés auxquelles elle fait face le matin pour arriver à son établissement. Elle est également embêtée par la rareté des lieux de divertissement pour les adolescents et par la cherté des endroits qui existent. «J’ai l’habitude de me retrouver avec mes amis dans les parcs, car c’est la solution la moins chère,» explique-t-elle. Cette étudiante du onzième degré [équivalent de la 2nde] du lycée Saúl Delgado regrette que les changements de ces derniers temps dans le pays n’aient pas eu beaucoup d’influence dans sa vie, et c’est la raison pour laquelle dans son groupe de camarades, les jeunes filles n’ont pas l’habitude de dialoguer sur des questions générales concernant la situation du pays.

Tandis que, d’un autre point de vue, Loipa del Castillo, une adolescente, pense que le début des relations avec les États-Unis représente un changement grâce auquel on devrait continuer à avancer, et que ce pays doit mettre fin au blocus économique qui nous touche tant. Elle dit que c’est l’un des sujets dont on parle le plus dans son groupe.

À partir de la fac, les préoccupations tournent un peu plus autour du pays et de l’avenir des nouvelles générations. Les jeunes savent qu’ils font partie des perspectives de demain. C’est ce que l’on constate dans la plupart des échanges qui ont lieu à l’Université de La Havane et dans ses facultés voisines. «Nous sommes préoccupés par la vague de migration, que nous constatons, de personnes qui partent illégalement ou non.

Cela a toujours existé, mais parfois nous avons vraiment l’impression que le phénomène s’accentue. Alors on s’interroge sur ce que sera l’avenir du pays, si ça va s’améliorer ou empirer, car parfois les avis qui s’expriment sur ce sujet ne sont pas si positifs,» expose Talía Piñón, étudiante en Biochimie de la Faculté de Biologie du centre de hautes études. «D’une façon générale, je crois que nous les personnes mineures, nous vivons beaucoup au jour le jour, sans essayer de penser plus loin, et que nous attendons de voir ce qui va se passer.

Comme presque tous les jeunes étudiants, je me préoccupe de ce que sera mon avenir professionnel quand j’aurai mon diplôme, s’il va correspondre à mes attentes ou non,» explique cette future professionnelle de la recherche. Laura Manresa est étudiante en Sciences de l’Informatique et elle remarque que c’est des relations avec les États-Unis que l’on parle le plus dans son milieu, ainsi que de la possibilité d’échanger avec des élèves d’autres universités. «Dans ma faculté, les gens veulent plus d’internet, plus de possibilités d’ouvrir notre champ de connaissances, d’interagir avec d’autres sites et de trouver des lieux où il y a le plus de chances de développer ce que nous étudions et d’enrichir notre formation,» résume-t-elle. «En outre, il serait bon d’améliorer l’économie, qu’il y ait plus de produits, plus de variété en tout. Par chance, en ce qui nous concerne, l’éducation est très bonne et nous sortons très qualifiés de ce cursus si complexe,» considère-t-elle. Du fait des examens, ces mois-ci sont particulièrement stressants.

C’est ce que confirme Yanet Álvarez, étudiante en Droit, qui souligne aussi que pour elle, parmi les urgences, «il devrait y avoir plus de lieux pour se distraire, parce qu’en dehors des fêtes qu’on organise à l’université, il n’y a pas grand chose.» «Je crois que ce qui nous inquiète le plus, c’est de savoir ce que nous ferons quand nous serons diplômés, car nous ne savons pas si cela correspondra à ce que nous étudions et si cela nous permettra de vivre, ce qui au final est le but de tout ce que nous faisons.

cuba,femmes,sociétéCette incertitude, est-ce que l’on étudie par plaisir pour ensuite se consacrer à autre chose, est toujours préoccupante,» réfléchit Claudia Quintana, élève en Cybernétique. Lorena León, qui suit des études de Mathématiques, nous fait part de ses projets: terminer l’école, commencer à travailler et fonder une famille. «En ce qui concerne le pays, je suis très préoccupée par la situation économique, par nos relations avec le monde et par les conséquences économiques et politiques qu’aura pour Cuba un rapprochement avec les États-Unis,» analyse-t-elle.

À la Faculté de Philosophie, Sociologie et Histoire de la même Université, Debbie Díaz parle de ses préoccupations plus tournées sur l’humain. Elle s’inquiète du comportement des jeunes qui se montrent parfois agressifs, et du fait qu’une partie d’entre eux sont peu cultivés et se contentent de vivre avec ce qu’ils savent sans chercher plus loin. «En plus d’étudier l’Histoire, je me consacre à la musique, et même si les deux professions me plaisent, je finis par pencher plus vers la seconde, car je vois un avenir plus difficile comme historienne, même si la musique dépend aussi beaucoup des circonstances.

J’aimerais en savoir plus sur les cultures et les métiers dans les autres pays, car il est plus facile de rencontrer ici des étudiants d’autres nations, alors que pour nous, il est très difficile de voyager et d’enrichir nos connaissances, surtout en ce qui concerne la langue; il y a de moins en moins de jeunes formés dans d’autres langues,» analyse la jeune fille.

Vêtues de blanc et bleu, deux jeunes étudiantes en Médecine font irruption et n’hésitent pas à parler de leur univers quotidien. «Nous sommes choquées par le fait que de nombreuses personnes n’aient pas conscience des vrais dangers qui touchent la société et mettent leur vie en danger,» indique Berenice Peña, qui rejoint la préoccupation de sa camarade Anabel Carreras à propos du manque de bibliographie spécialisée pour progresser dans sa profession.

Au-delà de ces préoccupations, un rêve leur tient à cœur à toutes les deux : celui de savoir que leur avenir sera consacré à aider les personnes grâce à ce qu’elles vont apprendre au cours de leurs études. Et c’est une motivation suffisante pour aller vers l’avenir.

Auteur : Susana Gomes Bugallo, journaliste au quotidien Juventud Rebelde, Cuba. En exclusivité pour la revue Cuba Sí, de France-Cuba

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23:24 Publié dans AL-Pays : Cuba, Société | Tags : cuba, femmes, société | Lien permanent | Commentaires (0) |  Imprimer | |  Facebook | | | | Pin it! | | |  del.icio.us | Digg! Digg

18/10/2015

Femmes à Cuba : la Révolution émancipatrice

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Introduction 

            Le triomphe de la Révolution cubaine a engendré le plus remarquable bouleversement politique, économique et social de l’histoire de l’Amérique latine. Dès 1959, les nouvelles autorités dirigées par Fidel Castro ont placé les déshérités, en particulier les femmes et les personnes de couleur, principales victimes des discriminations inhérentes à une société patriarcale et ségrégationniste, au centre du projet réformateur.

La Révolution « des humbles, par les humbles et pour les humbles [1] » devait jeter les bases d’une nouvelle ère égalitaire, débarrassée des affres des injustices liées à l’histoire et aux structures sociales du pays.
           cubasanté.jpg La femme cubaine a été la priorité immédiate du gouvernement révolutionnaire avec la création, dès 1960, de la Fédération de femmes cubaines (FMC), dont la présidente fut Vilma Espín Dubois, militante pleinement engagée contre la dictature du général Fulgencio Batista et épouse de Raúl Castro. Quel était le statut de la femme au triomphe de la Révolution ? Quelles mesures concrètes ont été adoptées pour diffuser et appliquer les idées de l’égalité des droits et des opportunités entre les hommes et les femmes, et mettre un terme aux préjugés et aux stéréotypes culturels ?
Trois axes structureront cette réflexion. Dans un premier temps, une attention particulière sera accordée à la place de la femme avant le triomphe de la Révolution. Ensuite, il conviendra d’analyser les mesures prises par le nouveau pouvoir pour permettre à ce secteur de la société d’atteindre l’émancipation définitive et la pleine citoyenneté. Enfin, au-delà des grandes déclarations de principes, un regard sera porté sur son statut aujourd’hui pour évaluer son intégration dans la vie politique, économique et sociale du pays. 

1.      La place de la femme avant le triomphe de la Révolution

cubafemme1.jpgSous le régime militaire de Fulgencio Batista de 1952 à 1958, la femme cubaine, soumise au carcan d’une société patriarcale, ne représentait que 17% de la population active et recevait une rémunération sensiblement inférieure à celle de l’homme pour un emploi équivalent. Cantonnée au rôle de mère au foyer chargée des tâches domestiques, sous la férule de l’omnipotence du mari, première victime de l’illettrisme qui frappait une grande partie de la population, les perspectives d’avenir étaient plutôt sombres pour la femme cubaine. Ainsi, sur les 5,8 millions d’habitants, avec un taux de scolarisation de seulement 55% pour les enfants de 6 à 14 ans, plus d’un million d’enfants n’avaient pas accès à l’école et étaient cantonnés au foyer familial, à la charge de la mère. L’analphabétisme touchait 22% de la population, soit plus de 800 000 personnes, dont une majorité de femmes [2].


Malgré l’obtention du droit de vote dès 1934, sous le gouvernement progressiste de Ramón Grau San Martín émanant de la Révolution populaire de 1933, le rôle de la femme dans la vie politique a été très limité. Ainsi, de 1934 à 1958, seules 26 femmes ont occupé un poste législatif avec 23 députées et 3 sénatrices [3].
En revanche, la femme cubaine a joué un rôle-clé dans la lutte insurrectionnelle contre la dictature de Fulgencio Batista, notamment au travers d’organisations telles que le Frente Cívico de Mujeres Martianas et las Mujeres Oposicionistas Unidas. Les femmes cubaines ont intégré la guérilla du Mouvement 26 Juillet de Fidel Castro en créant en septembre 1958 le peloton militaire « Mariana Grajales », exclusivement féminin, dans la Sierra Maestra. Plusieurs figures féminines, telles que Celia Sánchez, Melba Hernández, Haydée Santamaría ou Vilma Espín, entre autres, ont émergé du mouvement révolutionnaire contre le régime militaire [4]. Néanmoins, les revendications de ces militantes n’étaient pas purement féministes. Comme l’a souligné Maruja Iglesias, dirigeante du Frente Cívico de Mujeres Martianas, « nous ne luttions pas pour les droits de la femme. Nous luttions pour les droits de tous [5] ». 

2.      Premières mesures du gouvernement révolutionnaire

        cubamedecins1.jpgDepuis le triomphe de la Révolution en 1959, dont les fondements idéologiques se trouvent dans la pensée du Héros national José Martí, l’Etat cubain a fait de l’émancipation de la femme l’une de ses principales priorités. Dès son premier discours prononcé le 1er janvier 1959 à Santiago de Cuba, quelques heures après la fuite de Batista, Fidel Castro avait fait allusion à la situation de la femme et avait rappelé que la mission du processus révolutionnaire était de mettre un terme à la subordination sociale des plus opprimés :

Il s’agit d’un secteur de notre pays qui a besoin d’être libéré, car il est victime de la discrimination au travail et dans d’autres aspects de la vie […] Quand l’on jugera notre révolution dans les années futures, l’une des questions pour lesquelles nous serons jugés sera la manière dont nous aurons résolu, dans notre société et notre patrie, les problèmes de la femme, même s’il s’agit d’un des problèmes de la révolution qui requièrent le plus de ténacité, le plus de fermeté, le plus de constance et d’effort [6].

La femme cubaine a été la principale bénéficiaire des conquêtes sociales et populaires. Ainsi, dès 1960, la Fédération des femmes cubaines (FMC) fondée par Vilma Espín, a vu le jour afin de défendre les mêmes droits pour tous et mettre un terme aux discriminations. La femme devait enfin occuper l’espace social qui lui correspondait et contribuer pleinement à l’édification de la nouvelle Patrie. Fidel Castro en avait souligné l’importance : « La femme cubaine, doublement humiliée et reléguée par la société semi-coloniale avait besoin de sa propre organisation, que représenterait ses intérêts spécifiques et qui travaillerait pour obtenir la plus grande participation dans la vie économique, politique et sociale de la Révolution [7] ». La FMC compte aujourd’hui plus de 4 millions de membres.
        Vilma Espín Dubois a joué un rôle fondamental dans l’émancipation de la femme cubaine. Militante révolutionnaire, elle a intégré le Mouvement 26 Juillet et a été membre de la Direction nationale. En 1958, Vilma Espín a rejoint le Second Front Oriental Frank País, devenant l’une des premières femmes à participer à la guérilla. Après le triomphe de la Révolution, elle a dédié sa vie à la lutte des femmes cubaines pour l’égalité, jusqu’à sa disparition en 2007. Elle a ainsi présidé la Commission nationale de prévention et d’attention sociale, la Commission de l’enfance, la jeunesse et de l’égalité des femmes au sein du Parlement cubain [8].
        L’une des premières tâches de la FMC a été de lutter contre la prostitution, nécessité vitale pour près de 100 000 femmes de la Cuba prérévolutionnaire, et de les impliquer dans la construction de la nouvelle société. Avec la disparition des conditions économiques et sociales responsables de l’exploitation sexuelle des femmes, la réadaptation sociale a été d’autant plus facilitée par l’existence d’une structure fédérative féminine.
        cubaecole.jpgSuivant l’adage de José Martí « être cultivé pour être libre », Cuba a lancé en 1961 une grande campagne d’alphabétisation qui a permis à toutes les catégories de la société, en particulier aux femmes – et surtout aux femmes de couleur –, de bénéficier de ce progrès social qui ouvrait la voie vers l’égalité. Plus de 10 000 écoles primaires ont été créées la même année, soit plus que durant les soixante ans de république néocoloniale. Les résultats furent immédiats : plus de 700 000 personnes, dont 55% de femmes, ont été alphabétisées en douze mois et l’analphabétisme fut réduit à 3,8%. En 1961, Cuba a été déclarée par l’UNESCO « premier territoire libre d’analphabétisme », fait unique en l’Amérique latine et La Caraïbe à l’époque. Dès 1961, Cuba a créé les cercles infantiles destinés à permettre aux mères cubaines d’avoir accès à la formation, au travail et de participer à la vie économique du pays [9].
        Cuba a ensuite mis en place un arsenal constitutionnel et législatif destiné à promouvoir les droits des femmes et l’égalité pour tous. Les articles 41 et 42 de la Constitution inscrivent dans le marbre l’égalité des droits entre femmes et hommes et sanctionnent toute « discrimination pour motif de race, couleur de peau, sexe, origine nationale, croyances religieuses ou toute autre atteinte à la dignité humaine [10] ». La Loi 62 du Code pénal (article 295) typifie comme délit, passible d’une peine de deux ans de prison, toute atteinte au droit à l’égalité [11]. Les femmes ont ainsi accès à tous les postes de la fonction publique et à toutes les hiérarchies des forces armées [12].
        Au niveau international, Cuba a également joué un rôle d’avant-garde dans la promotion des droits des femmes. Ainsi, l’île de la Caraïbe est le premier pays d’Amérique latine à avoir légalisé l’avortement en 1965. Seules deux nations du continent, le Guyana en 1995 et l’Uruguay en 2012, ont suivi l’exemple de Cuba en accordant le droit imprescriptible aux femmes de disposer de leur propre corps. De la même manière, Cuba est le premier pays au monde à avoir signé la Convention sur l’Elimination de toutes les formes de discrimination contre la femme, et le second à l’avoir ratifiée. 

3.      La femme à Cuba aujourd’hui

       cuba-elecciones-press1.jpg La santé et le bien-être de la femme cubaine ont été érigés en priorités nationales depuis l’avènement de la Révolution cubaine en 1959, comme l’illustrent les indicateurs dans ce domaine. Ainsi, l’espérance de vie des femmes est de 80 ans, supérieure de deux ans à celle des hommes, et elle est similaire à celle des nations les plus développées. Le taux de mortalité infantile est de 4,6 pour mille, soit le plus bas du continent américain – Canada et Etats-Unis compris – et du Tiers-monde. Le taux de mortalité maternelle est de 0,02%, soit le plus bas d’Amérique latine et du Tiers-monde. Le taux de fécondité (nombre d’enfants par femme) est de 1,5 selon la Banque mondiale, c’est-à-dire le plus bas d’Amérique latine, ce qui n’est pas sans poser un problème de renouvellement générationnel [13].
        D’un point de vue légal, l’article 59 du Code du travail protège spécifiquement les mères cubaines. Il stipule que « l’employeur doit créer et maintenir des conditions de travail pour la femme, en prenant en compte sa participation dans le processus du travail et sa fonction sociale comme mère ». Ainsi, les mères cubaines ont la possibilité de s’occuper à temps plein de leur nouveau-né tout en percevant l’intégralité de leur salaire un mois et demi avant l’accouchement et trois mois après la naissance de l’enfant. Le congé peut durer un an avec une rémunération égale à 60% de leur salaire. Au bout d’un an, elles sont automatiquement réintégrées dans leur travail. Par ailleurs, le droit du travail cubain permet à la femme de partir à la retraite à 60 ans ou après avoir cotisé pendant 30 annuités. En guise de comparaison, la femme française doit avoir cotisé pendant 42 annuités pour avoir la possibilité de prendre une retraite à taux plein.
        Les femmes représentent près de 60% des étudiants du pays et plus de 65% d’entre elles sont diplômées de l’enseignement supérieur. Au niveau professionnel, depuis 1980, les femmes actives disposent en moyenne d’un niveau de formation supérieur à celui des hommes actifs. Si les femmes ne représentent que 44% de 5,5 millions de personnes qui composent la population active du pays, chiffre qui illustre les efforts encore à réaliser dans le voie de l’égalité pleine [14], en revanche, elle constituent 66,4% des techniciens et professionnels du pays de niveau moyen et supérieur (enseignants, médecins, ingénieurs, chercheurs, etc.) et 66% des fonctionnaires civils (contre 6,2% avant 1959) [15].
        De la même manière, aujourd’hui, à travail égal, la législation cubaine impose que le salaire de la femme soit strictement le même que celui de l’homme. En France, selon l’INSEE, à emploi égal, le salaire de la femme est inférieur de 28% à celui de l’homme [16]. Aux Etats-Unis, le salaire de la femme ne représente que 80% de celui de l’homme [17].
        A Cuba, les femmes occupent 46% des postes de direction dans le secteur économique (contre 2% avant le triomphe de la Révolution). A titre comparatif, en France, parmi les 40 sociétés du CAC 40, seules cinq sont dirigées par des femmes [18].  Au niveau administratif et judiciaire, les femmes cubaines représentent 66% des membres de l’inspection des Finances et du Tribunal suprême et 78% des fonctionnaires du Parquet [19].
        La femme cubaine est pleinement intégrée dans la vie politique du pays. Les statistiques dans ce domaine sont révélatrices. Ainsi, des 31 membres du Conseil d’Etat cubain, 13 sont des femmes, soit 41,9%. Au niveau exécutif, il y a 8 femmes ministres sur 34, soit 23,5%. Au Parlement cubain, sur les 612 députés, 299 sont des femmes, soit 48,66%. En France, le taux de femmes parlementaires (Assemblée nationale + Sénat) est de 26%. Cuba occupe le troisième rang mondial du plus grand pourcentage de femmes élues députés. A titre indicatif, les Etats-Unis occupent le rang 80.
        Une femme, María Mari Machado, occupe la vice-présidence du Parlement cubain. Au niveau des Assemblées provinciales, sur les 1268 élus, 48,36% sont des femmes. Les femmes cubaines président 10 des 15 Assemblées provinciales du pays, soit 66,6%, et occupent la vice-présidence dans 7 d’entre elles, soit 46,6%. Sur les 115 membres du Comité Central du Parti Communiste cubain, 49 sont des femmes, soit 42,6%. La secrétaire du Parti communiste pour la province de La Havane, la plus importante du pays, est Lázara Mercedes López Acea, une femme de couleur née en 1964. Elle est également vice-présidente du Conseil d’Etat et du Conseil des Ministres. Ces résultats sont d’autant plus remarquables qu’il n’existe aucune loi à Cuba obligeant à la parité pour les postes politiques.
        Par ailleurs, sur les 16 dirigeants syndicaux provinciaux de la Confédération des travailleurs cubains (CTC), 9 sont des femmes, soit 56,25%.
       cubanepal.jpg Au niveau de la diplomatie, Cuba est représentée par des femmes dans pas moins de 47 pays. Au Ministère des Affaires étrangères, plus de 40% des fonctionnaires sont des femmes et plusieurs d’entre elles occupent des postes de vice-ministre. Josefina Vidal, Directrice du Département des Etats-Unis au sein du Ministère cubain des Affaires étrangères, est chargée de mener les négociations avec Washington dans le processus historique de normalisation des relations bilatérales annoncé par les Présidents Barack Obama et Raúl Castro le 17décembre 2014 [20].
        A Cuba, la pratique sportive est considérée comme étant indispensable au développement physique et intellectuel des citoyennes et des citoyens, qui ont accès gratuitement à toutes les installations et infrastructures du pays. L’Institut national des sports a mis en place tout un éventail de programmes pour toutes les catégories de la population et toutes les générations. Les résultats sont édifiants : pour ce qui est du sport de haut niveau, la femme cubaine occupe une place de premier choix et Cuba est le pays d’Amérique latine qui dispose – en chiffres absolus – du plus grand nombre de médaillées olympiques avec 49 titres [21].
        Les Nations unies, par le biais de la Commission économique pour l’Amérique latine et la Caraïbe (CEPAL), ont salué la politique de l’Etat cubain en faveur des femmes. Alejandrina Germán, présidente de Conférence régionale sur la femme et également Ministre de la femme de la République dominicaine, a souligné que Cuba a toujours joué un rôle avant-gardiste dans la promotion et la défense des droits des femmes, rappelant que l’égalité des genres dépendait d’abord et avant de la volonté politique des dirigeants [22].

        Si la prostitution a disparu en tant que réalité sociale institutionnalisée, il convient de noter la résurgence de ce phénomène à partir des années 1990, avec la crise économique, la recrudescence des sanctions imposées par les Etats-Unis et l’ouverture du pays au tourisme de masse. Le Centre d’éducation sexuelle, dirigée par Mariela Castro Espín, fille de l’actuel Président Raúl Castro et de la fondatrice de la FMC Vilma Espín, joue un rôle important, basé sur la prévention et la persuasion, dans la lutte contre ce fléau [23].
        Cuba a mis en place un arsenal législatif et juridique dissuasif contre la violence de genre. Le Groupe national de prévention et d’attention de la violence familiale, entité transversale multisectorielle et pluridisciplinaire qui inclut les Ministères de l’Education, de la Santé, de l’Intérieur, de la Justice, les services du Procureur général de la république, de la Médecine légale, du Centre national d’éducation sexuelle, de l’Université de La Havane, du Tribunal Suprême et de l’Institut de Radio et Télévision, est chargé de la lutte contre la violence faite aux femmes. Le Code pénal sanctionne sévèrement ce type d’atteinte à l’intégrité physique et psychologique et la violence conjugale est considérée comme étant une circonstance aggravante.
       Si les comportements machistes, sexistes et discriminatoires, hérités de cinq siècles de société patriarcale avec ses obstacles intrinsèques d’ordre culturel, idéologique et psychologique, persistent toujours dans la Cuba d’aujourd’hui et constituent encore un obstacle à l’émancipation pleine et entière de la femme, néanmoins, celle-ci joue indéniablement un rôle prépondérant dans la société et participe pleinement au développement du pays.

Conclusion

cuba,femmes,salim lamraniLa Révolution cubaine a incontestablement ouvert la voie vers l’affranchissement de la femme. Tous ses droits, qu’ils soient économiques, sociaux, culturels, civils ou politiques, sont garantis par la Constitution et la femme a été la principale bénéficiaire du processus de transformation sociale initiée en 1959.
        Reléguée à un rang social subalterne dans la Cuba néocoloniale, elle est devenue un sujet actif qui a grandement contribué à l’édification d’une société nouvelle basée sur l’égalité et la justice sociale. La femme cubaine joue désormais un rôle essentiel dans la vie politique, économique, sociale et culturelle du pays.
        « Toute la patrie se trouve dans la femme », disait, à juste titre, José Martí. Néanmoins, si les normes juridiques existantes permettent l’épanouissement et la réalisation de la femme à Cuba, si les indicateurs et les statistiques restent exceptionnels pour une nation du Tiers-Monde et si la femme cubaine n’a rien à envier à ses paires des pays les plus développés, il reste encore certains obstacles d’ordre culturel, psychologique et idéologique à franchir dans le chemin sinueux vers l’émancipation totale.

Salim Lamrani

Docteur ès Etudes Ibériques et Latino-américaines de l’Université Paris IV-Sorbonne, Salim Lamrani est Maître de conférences à l’Université de La Réunion, et journaliste, spécialiste des relations entre Cuba et les Etats-Unis.

Son nouvel ouvrage s’intitule Cuba, parole à la défense !, Paris, Editions Estrella, 2015 (Préface d’André Chassaigne).

Contact : lamranisalim@yahoo.fr ; Salim.Lamrani@univ-reunion.fr

Page Facebook : https://www.facebook.com/SalimLamraniOfficiel

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[1] Fidel Castro, “Discurso pronunciado por Fidel Castro Ruz, Presidente de Dobla República de Cuba, en las honras fúnebres de las víctimas del bombardeo a distintos puntos de la república, efectuado en 23 y 12, frente al cementerio de Colón, el día 16 de abril de 1961”, República de Cuba. http://www.cuba.cu/gobierno/discursos/1961/esp/f160461e.html (site consulté le 8 mars 2015).

[2] Acela Caner Román, “Mujeres cubanas y el largo camino hacia la libertad”, Biblioteca Nacional José Martí, août 2004. http://librinsula.bnjm.cu/1-205/2004/agosto/31/documentos/documento104.htm(site consulté le 15 novembre 2014)

[3] Joseba Macías, « Revolución cubana: Mujer, Género y Sociedad Civil”, Viento Sur. http://www.vientosur.info/documentos/Cuba%20%20Joseba.pdf (site consulté le 15 novembre 2014)

[4] Ibid.

[5] Ibid.

[6] Fidel Castro Ruz, “Discurso pronunciado por el Comandante Fidel Castro Ruz, en el Parque Céspedes de Santiago de Cuba”, República de Cuba, 1er janvier 1959. http://www.cuba.cu/gobierno/discursos/1959/esp/f010159e.html (site consulté le 18 avril 2015).

[7] Acela Caner Román, “Mujeres cubanas y el largo camino hacia la libertad”, Biblioteca Nacional José Martí, op. cit.

[8] Federación de Mujeres Cubanas, « Dossier Vilma Espín ». http://www.mujeres.co.cu/dossiervilma/HTML/01.html (site consulté le 18 avril 2015).

[9] Acela Caner Román, “Mujeres cubanas y el largo camino hacia la libertad”, Biblioteca Nacional José Martí, op. cit.

[10] Constitución de la República de Cuba, 1976, Artículo 41 & 42.

[11] Código Penal Cubano.

[12] Dalia Isabel Giro López, “Mujeres haciendo Revolución”, Cuba Defensa, 20 août 2013. http://www.cubadefensa.cu/?q=node/2158 (site consulté le 18 avril 2015) ; Sonia Regla Pérez Sosa, « Homenaje a las mujeres de las FAR », Cuba Defensa, 5 mars 2015. http://www.cubadefensa.cu/?q=homenaje%20mujeres%20FAR (site consulté le 18 avril 2015).

[13] Banque mondiale, “Tasa de fertilidad, total (nacimientos por cada mujer)”, 2014. http://datos.bancomundial.org/indicador/SP.DYN.TFRT.IN/countries (site consulté le 8 mars 2015).

[14] Mariela Pérez Valenzuela, “Mujer cubana: una fortaleza en la economía nacional”, Federación de Mujeres Cubanas. http://www.mujeres.co.cu/714/beijing1.html (site consulté le 15 novembre 2014)

[15] Mujeres, « Cuba en el CEDAW ». http://www.mujeres.co.cu/cedaw/texto/01.html (site consulté le 15 novembre 2014)

[16] Thomas Morin & Nathan Remila,  « Le revenu salarial des femmes reste inférieur à celui des hommes », INSEE, http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?ref_id=ip1436 (site consulté le 15 novembre 2014)

[17] Le Figaro, « La crise pousse les Américaines à travailler », 18 novembre 2009. http://www.lefigaro.fr/emploi/2009/11/18/01010-20091118ARTFIG00628-la-crise-pousse-les-americaines-a-travailler-.php (site consulté le 15 novembre 2014)

[18] Camille Boulate, “Les cinq femmes à la direction générale du CAC 40”, Les Echos, 7 mars 2013.  http://business.lesechos.fr/directions-generales/les-quatre-femmes-a-la-direction-generale-du-cac40-5300.php (site consulté le 15 novembre 2014)

[19] Federación de Mujeres Cubanas, “Cubanas en cifras”, 2014. http://www.mujeres.co.cu/715/plegable2.pdf (site consulté le 15 novembre 2014), p. 7-9.

[20] Salim Lamrani, « Acercamiento Cuba-Estados Unidos : perspectivas y obstáculos », Al Mayadeen, 23 février 2015. http://espanol.almayadeen.net/Study/uJUAe1pzFUiV8aRIAF9FTA/acercamiento-cuba-estados-unidos--perspectivas-y-obst%C3%A1culos (site consulté le 8 mars 2015).

[21] Federación de Mujeres Cubanas, “Cubanas en cifras”, novembre 2014. http://www.mujeres.co.cu/715/plegable2.pdf(site consulté le 8 mars 2015). p. 8, 9.

[22] Margen Borges, « Destacan en Cepal política de Estado cubano a favor de mujeres », Federación de Mujeres Cubanas, 2014. http://www.mujeres.co.cu/articulo.asp?a=2014&num=714&art=51 (site consulté le 15 novembre 2014)

[23] Centro Nacional de Educación Sexual. http://www.cenesex.org/(site consulté le 15 novembre 2014)

11:14 Publié dans AL-Pays : Cuba, Amérique Latine, Culture, Société | Tags : cuba, femmes, salim lamrani | Lien permanent | Commentaires (0) |  Imprimer | |  Facebook | | | | Pin it! | | |  del.icio.us | Digg! Digg

03/05/2013

CUBA : LES FEMMES LA POLITIQUE ET LA SOCIETE !

mujeresparlamentocuba.jpg48,86% des députés à l’assemblée nationale cubaines sont des femmes, soit 299 sur 612. 

Elles n’ont pas été élus après la mise en place d’un quota mais par la reconnaissance de leurs compétences dans les domaines les plus divers et par leurs qualités .

Une analyse de la carte du monde des femmes en politique 2012 permet d'apprécier l’importance de cette participation des femmes au parlement.

La moyenne parlementaire du nombre d’élus ne dépasse pas 20% dans le monde.

Les parlementaires cubaines ont des expériences différentes, des âges et sont de professions variées. Parmi elles se trouvent une jeune athlète avec handicap, des travailleurs, des étudiants, des chefs de cultes.

Au conseil d’Etat, organisme gouvernemental alors qu’en 2008 on dénombrait huit femmes parmi les 31 membres du Conseil d’État, leur nombre est passé à treize.

mercedes.jpgParmi les nouveaux vice-présidents se trouve Mercedes Lopez Acea, première secrétaire du Comité provincial du Parti communiste à La Havane, ingénieur forestière.

Dans le cas des assemblées provinciales elles représentent 50,5% des délégués, un niveau record..

Dans les provinces de Matanzas, Las Tunas fois Mayabeque , les gouverneurs élus sont des femmes.

Par ailleurs, si l'on regarde le processus électoral, une majorité aussi la présence des femmes à toutes les étapes et les délais des élections.

UN RETARD QUI SE COMBLE

Dans les assemblées municipales le nombre de femmes conseillères municipales ne représentent que 33,6% des membres, chiffre cinq fois supérieur à celui des premières élections en 1976 mais en retrait par rapport à celui de l’assemblée nationale et des provinces.

Beaucoup ai été accompli en 50 ans de révolution, courte période de temps par rapport aux 500 de la culture judéo-chrétienne occidentale bâtie sur l'exclusion et la subordination des femmes.

Un proverbe chinois dit que la première étape est la plus longue. En 50 ans Cuba a franchi cette première étape avec la volonté d’aller beaucoup plus loin pour que l’égalité de droits entre les femmes et les hommes soit total et irréversible.

LA SOCIETE CUBAINE

Les femmes représentent 60% de la main-d'œuvre technique et professionnelle, plus de 70% des procureurs sont des femmes. Elles constituent également la majorité dans des secteurs clés comme la santé et l'éducation. Dans la recherche scientifique elle représentent une force significative.

En 1953 12% de la population féminine avait une activité professionnelle.

Sources : Magazine des femmes cubaines