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09/11/2013

Bolivie : Les charognards sont à l'affut

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L'été de Pau à La Paz, par Jean Ortiz. Au moment où les "Indigènes" (en Bolivie on utilise plus ce terme que celui "d'Indiens") trouvent enfin reconnaissance, considération,  "protagonisme", et épanouissent leurs langues, leurs cultures, ne voilà-t-il pas qu'un recensement officiel jette un trouble inattendu.

Au précédent recensement de 2001, 38% de la population déclarait n'appartenir à aucun des 36 peuples indigènes reconnus par la Constitution. Le recensement de 2012, à première vue, indiquerait une baisse des "peuples premiers". Ils ne représenteraient que 42% de la population  (les plus nombreux étant les quechuas). Ces résultats étonnants sont contestés  car pour certains les questions auraient été maladroites, mal posées, les"sondeurs" inexpérimentés, le délai trop court, précipité...

Qu'à cela ne tienne: tout fait ventre pour la droite néocoloniale, "blanche", raciste, de Santa Cruz et des départements de la "demi-lune", celle qui tenta un coup de force séparatiste. Elle s'est emparée goulument de ces pourcentages pour tenter de relancer les affrontements ethniques et plaider en faveur d'une "Bolivie majoritairement métis" (entendez "blanche"), qui serait discriminée par la politique, qu'elle qualifie  d'"indigéniste", du gouvernement Morales. "Finissons-en avec cette vilaine souillure indienne!" Le racisme pointe son nez, plus long que celui de Pinocchio. La droite, l'oligarchie, ont  toujours considéré les Indiens comme un handicap pour le pays, quasiment comme des animaux.

Alors tout est bon contre "le gouvernement des mouvements sociaux", y compris jouer avec le "nationalisme" racial et le feu raciste. Durant des siècle la "Bolivie métis" des colonisateurs, des capitalistes, effaça les Indiens du paysage, les nia, écrasa, exploita,"esclavisa"... On appelle cela un "ethnocide". Le vice-président Linera confirme cette analyse: "parler de nation métis c'est en réalité occulter un ethnocide commis par une classe sociale; parler de nation et d'Etat boliviens et de nations culturelles indigènes originelles , paysannes, permet de faire preuve du respect et de la reconnaissance des nations ancestrales, mais aussi d'affirmer une construction commune contemporaine, que nous bâtissons ensemble autour de notre identité bolivienne".

Les résultats étonnants de ce recensement, les conditions du recensement elles-mêmes, méritent étude sereine. Le colonialisme externe et interne n'a pas désarmé; il a toujours posé les problèmes sociaux et nationaux en termes raciaux. Aujourd'hui, être Indien est devenu enfin "normal". On est passé de la revendication identitaire à sa matérialisation quotidienne, à la dignité retrouvée, à une citoyenneté épanouie. Cette émancipation porte en elle de grandes potentialités pour reconstruire le pays et penser le monde autrement. Le régime d'hier, excluant,  fondé sur une prétendue hégémonie "non indienne" et la domination de classe des vieilles élites,  des grands propriétaires, perd peu à peu du terrain. Hier, être Indien c'était être "archaïque", improductif, considéré comme un frein au "progrès", et mille autres lieux communs stigmatisants. Les rituels étaient quasiment clandestins, "honteux". La ritualité, aujourd'hui, n'est plus l'exclusivité des seuls "Indigènes".

Le pays se "décolonise" contre vents et marées. Le MAS et EVO MORALES ont récupéré "ce qui est communautaire, donc de tous", et une fierté nationale qui essaime. Les 36 "peuples premiers" portent désormais une révolution, et une "modernité" (qui n'est pas la nôtre,  "l'occidentale", dont on sait ce qu'elle vaut). Les valeurs du "buen vivir" viennent de loin et portent loin. Il est de plus en plus difficile de caricaturer ces citoyens qui bâtissent une société où il fera bon vivre ensemble et où nul n'écrasera l'autre ni ne blessera la nature, la terre, la Pachamama (août est le mois des offrandes, du "pago", des rituels de la "wajta"). Tout cela peut expliquer sans doute pourquoi l'on se revendique désormais moins en termes d'appartenance ethnique. Qui plus est, la Bolivie n'est plus un pays majoritairement rural. Les paysans sont Indiens mais tous les Indiens ne sont pas paysans. A La Paz, ils tiennent des échoppes dans la rue, travaillent en usine ou sur les chantiers...

Beaucoup se sont prolétarisés tout en essayant de conserver leurs traditions communautaires dans leur nouveau milieu.  Il n'est pas facile de recréer et faire vivre des "communautés" dans les quartiers populaires, mais les "pratiques ancestrales" restent vivantes... Un nouveau système économique  où l'Etat décentralisé (trois niveaux d'autonomies) veut jouer un vrai rôle régulateur , redistributeur, ce que l'on appelle ici la transition "post-capitaliste", se consolide progressivement, malgré des tâtonnements, des conflits  et les tentatives de déstabilisation de la droite "blanche". On est en période d'apprentissage, de laboratoire quotidien inédit.

Equilibre. Harmonie. Mise en commun, sont les maîtres-mots.Tout cela semble avoir brouillé les cartes. Ces premiers éléments d'analyse, à chaud, méritent une réflexion plus poussée, plus dialectique, plus fine, mais sans parti pris raciste.

Jean Ortiz, pour l'Humanité

28/10/2013

LA DERNIERE INTERVIEW DU CHE !

RTS / En avril 1964, l'équipe de l'émission Point, conduite par le journaliste Jean Dumur, rencontre Ernesto "Che" Guevara à l'Hôtel Intercontinental, à Genève. Il occupe alors le poste de ministre de l'industrie et se trouve à Genève pour une conférence internationale. C'est pourquoi le "Che" s'exprime en français. A notre connaissance, c'est la seule interview faite en français de Guevara.

Avec décontraction, "Che" Guevara évoque les questions essentielles de la politique cubaine, notamment les conséquences du blocus américain, le rapprochement avec l'URSS et les perspectives d'une extension de la révolution en Amérique latine.

Une année après cette interview, il quitte ses fonctions ministérielles pour organiser la guerre révolutionnaire en Amérique latine. Le 8 octobre 1967, il est arrêté par l'armée bolivienne et exécuté le lendemain.

Retrouvez les impressions du reporter qui à fait cette interview:

17:06 Publié dans AL-Pays : Cuba, Amérique Latine, Histoire | Tags : le che, interview | Lien permanent | Commentaires (0) |  Imprimer | |  Facebook | | | | Pin it! | | |  del.icio.us | Digg! Digg

26/10/2013

LE SOJA D'AMERIQUE LATINE !

soja.jpgNous prenons la direction de l'Amérique Latine ce matin pour nous intéresser à la culture du soja. Longtemps critiquée pour contribuer à la déforestation de l'Amazonie, la culture du soja ne peut plus se faire n'importe comment. Mais le moratoire censé encadrer cette culture a ses limites et certains producteurs continuent de participer à la déforestation.

Les pressions exercées par Greenpeace et certains clients comme Carrefour ou Mac Donald ont eu raison de la déforestation effrénée de l'Amazonie provoquée par la culture du soja. Depuis 2006 : les principaux exportateurs brésiliens refusent d'acheter du soja cultivé sur des terres déboisées. Des amendes sont prévues pour sanctionner les acheteurs qui enfreindraient la règle. Et certaines multinationales agroalimentaires comme Cargill ou ADM ont même rejoint le mouvement. De quoi assurer une culture plus respectueuse de l'environnement. De moins pour 90% de la production de soja dans le pays.

Et les 10% restant me direz-vous? Et bien c'est là que me bât blesse. 18.400 ha de forêt amazonienne restent concernés par la déforestation. La faute aux éleveurs brésiliens, de manière indirecte du moins. Bien souvent, les éleveurs brûlent des parcelles de forêt, moins chères, pour semer de l'herbe et y faire venir le bétail. Mais après quelques années, les terres sont trop dégradées pour nourrir les cheptels. Alors les éleveurs se déplacent pour brûler de nouvelles parcelles. Les cultivateurs de soja eux, prennent leur place. Et le même scénario se répète indéfiniment.

soja1.jpgLe deuxième problème est lui à trouver du côté des consommateurs cette fois. Et parmi eux: les Chinois ont la palme. Le pays est le premier consommateur de soja dans le monde. Sa consommation a même explosé ces trente dernières années. Mais l'explication de cette augmentation fulgurante n'est pas à trouver dans la consommation directe de soja.

Seuls 20% du soja importé arrive finalement dans l'assiette des Chinois sous forme de tofu, lait ou sauce d'assaisonnement par exemple. En réalité, si les Chinois ont tant besoin de soja, c'est pour nourrir le bétail. L'élévation du niveau de vie dans le pays a provoqué une hausse de la demande de viande et de poisson des chinois qui peuvent désormais s'en offrir au quotidien. Or, la Chine s'approvisionne massivement au Brésil.

Mais pas question pour les Chinois de respecter les nouvelles règles brésiliennes. Pékin a tout simplement refusé de signer le moratoire de 2006. Mais pour les producteurs brésiliens, la culture du soja, c'est une question de survie. 2% du PIB dépend de cet oléagineux. Alors pour certains, la tentation est grande d'outrepasser la règlementation en vigueur.

Publié par RTBF

01/10/2013

Quand des milliers de juives étaient envoyées dans des bordels en Amérique du Sud

juiveprost.jpgC'est un chapitre peu connu de l'histoire contemporaine sur lequel se penche cette semaine l'hebdomadaire Der Spiegel. Entre 1860 et 1930, en pleine montée de l'antisémitisme, des milliers de jeunes juives pauvres d'Europe de l'Est ont émigré en Amérique du Sud dans l'espoir d'une vie meilleure, dupées par des proxénètes qui les envoyaient dans des bordels à leur arrivée.

A cette époque, les femmes blanches étaient très recherchées sur le marché de la prostitution en Amérique latine, qui se concentrait principalement dans les grandes villes portuaires, comme Buenos Aires et Rio de Janeiro. En Argentine, les prostituées juives étaient surnommées «esclavas blancas», esclaves blanches, tandis qu'au Brésil on les nommait «Polacas», les Polonaises.

L'écrivain Stefan Zweig en a fait une description dans son journal intime après avoir visité le quartier rouge de Rio en 1936:

«Les juives d'Europe de l'Est promettent les perversions les plus excitantes – qu'est-ce qui les a poussées à finir comme ça, à se vendre pour trois francs ? […] Certaines femmes sont vraiment belles – il règne chez toutes une mélancolie discrète – et c'est pourquoi leur avilissement, l'exposition dans le cadre d'une fenêtre, n'apparaît pas du tout vulgaire, émeut plus qu'il n'excite.»

Pour attirer les jeunes femmes, les proxénètes, parmi lesquels de nombreux juifs, leur promettait de leur offrir un emploi ou un mari, explique Der Spiegel:

«Pour assurer le ravitaillement, les proxénètes ne se font pas seulement passer pour des agents d'emploi […] mais pour des marieurs ou des époux. Ils se présentent lors de leurs voyages comme des gentlemen, comme des compatriotes et des coreligionnaires, se présentent bien habillés et mondains, et profitent de la misère et des peurs existentielles qui règnent dans les villes juives d'Europe de l'Est et de Russie, desquelles ils sont souvent originaires. Là-bas règnent la pauvreté, le chômage et la peur face à l'antisémitisme grandissant

Toutes ces jeunes femmes n'étaient pas des esclaves, tempère cependant Irene Stratenwerth, curatrice d'une exposition consacrée au destin tragique de ces jeunes femmes, qui a eu lieu l'an dernier au Centrum Judaicum à Berlin. Comme elle l'expliquait alors à Deutschlandradio Kultur:

«Je ne voudrais aussi pas parler absolument de prostitution forcée dans le sens où les filles auraient été contraintes de se prostituer par des forces obscures. Je dirais plutôt que de très, très nombreuses femmes étaient dans le pétrin, n'avaient en fait aucune autre possibilité de subsistance. »

Le pire était que la communauté juive implantée en Amérique du Sud, soucieuse de sa réputation, les bannissait au lieu de leur venir en aide. Ce sont donc les prostituées elles-mêmes qui ont dû s'organiser pour obtenir des droits, notamment celui d'être enterrées selon le rituel juif, qui leur était interdit, en créant leurs propres institutions et en achetant elles-mêmes des sépultures à Buenos Aires, à Rio de Janeiro et à São Paulo. Leurs tombes continuent toutefois d'être séparées par un mur de celles des juifs «intègres», précise Der Spiegel.

Image: Une prostituée juive. Document Der Spiegel.

Photo: Une prostituée juivre. Document Der Spiegel.
 

11:54 Publié dans Amérique Latine, Histoire | Tags : prostitution, amérique latine, juives | Lien permanent | Commentaires (0) |  Imprimer | |  Facebook | | | | Pin it! | | |  del.icio.us | Digg! Digg