12/09/2024
Cuba : la solidarité ne peut plus attendre
Par Charlotte Balavoine et Vincent Govelet, coordinateurs de la campagne de solidarité avec Cuba du PCF.
Il y a des crimes qui ne seront jamais sous le feu des projecteurs. Il y a des souffrances qu’on a intérêt à ne pas rapporter. C’est le cas pour Cuba. Le pays est victime, depuis 1960, du plus long blocus politique, économique et financier de l’histoire contemporaine. Loin d’être « un fantasme pour cacher les responsabilités du gouvernement cubain », comme l’affirment ses opposants, le blocus a des conséquences dramatiques pour la population et dans tous les secteurs de l’économie.
En un an, il aurait causé des dommages économiques estimés à 1 milliard de dollars dans le tourisme, 3 milliards pour le commerce extérieur, 467 millions pour l’industrie, 273 pour l’agriculture, 75,5 pour l’éducation, 202 pour les transports, 143 pour les biotechnologies et l’industrie pharmaceutique, 89 pour le BTP… Si la plupart des médias décident de le passer sous silence, ce n’est pas le fruit du hasard. Cuba est le seul pays à mettre en échec de façon continue l’impérialisme états-unien, et ce depuis 1959. Quand on nous vend le capitalisme comme fin de l’histoire, qu’un petit pays, proche des côtes de la Floride, refuse de se soumettre, c’est parfaitement insupportable pour l’Oncle Sam !
Depuis 1960 nous avons pris l’habitude de voir les Cubain·es résister, persévérer dans une voie socialiste singulière, maintenir à flot la révolution, réaliser des prouesses en matières éducatives ou médicales jusqu’à les exporter partout dans le monde. Nous avons pris l’habitude de nous dire que, si Cuba a survécu à la chute de l’URSS, alors elle tiendra bien quelques années de plus. Le temps… qu’on trouve le temps de s’y intéresser de nouveau.
Oui mais voilà : Cuba seule ne peut pas tout ! Le vieux pari de l’administration états-unienne d’étrangler le peuple jusqu’à ce qu’il se soumette… ou qu’il crève, n’a jamais été aussi proche du but ! Aujourd’hui le blocus touche aux besoins les plus vitaux : se procurer de l’insuline pour soigner le diabète, du lait en poudre pour les enfants, des seringues pour vacciner la population face aux pandémies… Jamais Cuba ne fera la une des médias parce que les États-Unis ont intérêt à continuer de mener leur politique meurtrière en silence !
Alors à nous d’imposer le thème dans le débat public ! À la Fête de l’Humanité sera organisée une collecte de médicaments et de matériel médical sur plusieurs stands du PCF. Tout le monde peut y participer. Il nous faut aussi créer des comités de campagne dans chaque département. Être plus forts, plus nombreux, meilleurs dans notre communication, mieux organisés dans la solidarité. Faire connaître la réalité de Cuba.
Si demain la Révolution cubaine venait à être défaite, ce n’est pas juste un peuple des Caraïbes qui en subirait les conséquences. C’est notre capacité commune à lutter contre l’impérialisme et à construire un monde meilleur qui serait entachée. Alors aujourd’hui plus que jamais : soyons solidaires de Cuba !
19:29 Publié dans Actualités, AL-Pays : Cuba, France, Point de vue, Politique | Tags : cuba, solidarité | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook | | |
26/03/2018
La politique cubaine de Donald Trump est vouée à l’échec
Salim Lamrani, 26 mars 2018
Depuis son arrivée à la Maison-Blanche, les relations entre Cuba et les Etats-Unis n’ont cessé de se détériorer en raison de la décision de Donald Trump d’appliquer de nouveau une politique basée sur l’hostilité.
En juin 2017, le Président des Etats-Unis Donald Trump a annoncé un revirement total de la politique étrangère des Etats-Unis vis-à-vis de Cuba. Alors que son prédécesseur Barack Obama avait pris la mesure de l’échec de la stratégie étasunienne envers l’île durant plus d’un demi-siècle et initié un processus de rapprochement avec La Havane, l’actuel locataire de la Maison-Blanche a annoncé qu’il appliquerait désormais une ligne dure avec Cuba [1].
Barack Obama avait rétabli les relations diplomatiques et ouvert une ambassade en 2015, près de 54 ans après la rupture unilatérale opérée par Washington en janvier 1961. Sans permettre aux touristes ordinaires étasuniens de se rendre à Cuba, Washington avait néanmoins ouvert la possibilité à douze catégories de voyageurs de se rendre dans l’île et avait permis les vols directs entre les deux pays. Ce nouveau panorama avait permis à de nombreux citoyens étasuniens de visiter Cuba pour la première fois. Ainsi, le nombre de visiteurs étasuniens dans l’île est passé de 91 254 personnes en 2014 à 161 233 en 2015, et 284 552 en 2016 [2], pour atteindre le chiffre record de 619 523 en 2017 [3].
Contre toute attente, le 29 septembre 2017, le secrétaire d’Etat Rex W. Tillerson a annoncé que Washington réduisait à son strict minimum son personnel diplomatique présent à Cuba pour des raisons de sécurité. Washington a évoqué de mystérieux problèmes de santé dus à des « attaques acoustiques » qui auraient affecté une vingtaine de membres de l’Ambassade des Etats-Unis à La Havane entre décembre 2016 et août 2017. Washington reconnaît que les « enquêteurs ont été incapables de déterminer qui était responsable de ces attaques et quelles en étaient les causes [4] ».
En plus de réduire drastiquement son personnel diplomatique, l’administration Trump a décidé de sanctionner La Havane en expulsant 17 membres de l’ambassade de Cuba de Washington, dont toute l’équipe du bureau des affaires économiques et commerciales [5]. Pourtant, les Etats-Unis ont souligné la pleine coopération des autorités cubaines au sujet de cette affaire : « Cuba nous a indiqué qu’elle continuerait à enquêter sur ces attaques et nous continuerons à coopérer avec eux [6] ».
De leur côté, les autorités cubaines, par la voix de Bruno Rodríguez, Ministre des Affaires étrangères, ont regretté le manque de collaboration et de transparence de la part des Etats-Unis sur cette affaire. En effet, Washington s’est refusé à fournir à La Havane les éléments d’enquête à sa disposition. Aucune des personnes touchées par ce mal mystérieux n’a pu être interrogée par les enquêteurs cubains et leurs noms ont été maintenus secrets [7].
La raison probable de ce refus a été révélée par Peter Kornbluh, Directeur du Projet de Documentation sur Cuba des Archives de la Sécurité nationale de Washington : « Un nombre très important des personnes affectées étaient des membres de la station de la CIA à Cuba [8]. » Or, les Etats-Unis n’admettront jamais la présence d’éléments de la CIA à Cuba ou dans n’importe quel autre pays au monde en raison du caractère clandestin et illégal de leurs activités.
Dans le même temps, Washington a décidé de classer Cuba dans la catégorie des pays à risque pour ce qui concerne les voyages. Pourtant, le Département d’Etat a reconnu qu’aucun des près de 620 000 citoyens étasuniens qui se sont rendu dans l’île en 2017 n’a été victime d’une quelconque attaque sonique : « Nous ne disposons d’aucune information selon laquelle des citoyens des Etats-Unis auraient été affectés [9] ».
En raison de la réduction drastique des effectifs de la représentation diplomatique étasunienne à La Havane, le consulat n’est plus en mesure d’assurer ses missions [10]. Ainsi, les Cubains qui souhaitent se rendre aux Etats-Unis dans le cadre d’un projet migratoire, d’un voyage professionnel, d’un séjour familial, ou autres, doivent désormais obligatoirement passer par le consulat des Etats-Unis à ... Bogota, en Colombie. En outre, les Etats-Unis se retrouvent de fait dans l’incapacité de respecter les accords migratoires signés en 1994 avec La Havane, dans lesquels ils s’engagent à fournir au moins 20 000 visas par an. En effet, l’immense majorité des candidats à l’émigration n’a pas les moyens de se payer le coûteux voyage en Colombie, surtout qu’aucune garantie n’est fournie quant à une éventuelle issue favorable à leur demande de visa [11].
En revenant à une politique basée sur l’hostilité à l’égard de Cuba, l’administration Trump met un terme aux progrès observés durant la présidence de Barack Obama et s’accroche à une stratégie anachronique. Cette dernière est vouée à l’échec et a isolé les Etats-Unis sur la scène internationale, comme l’illustre le dernier vote de novembre 2017 de l’Assemblée générale des Nations unies où 191 pays ont condamné pour la 26e année consécutive les sanctions économiques imposées à Cuba. De la même manière, Washington s’oppose à la volonté de la majorité des citoyens des Etats-Unis qui aspirent à normaliser les relations avec Cuba et à pouvoir se rendre sur l’île en tant que touristes, sans obstacles, chose interdite depuis plus d’un demi-siècle par Washington. Pour sa part, Cuba a toujours fait montre de sa disposition à entretenir des liens cordiaux et pacifiques avec Washington basés sur l’égalité souveraine, la réciprocité et la non-ingérence dans les affaires internes.
Salim Lamrani
Docteur ès Etudes Ibériques et Latino-américaines de l’Université Paris IV-Sorbonne, Salim Lamrani est Maître de conférences à l’Université de La Réunion, et journaliste, spécialiste des relations entre Cuba et les Etats-Unis.
Son nouvel ouvrage s’intitule Fidel Castro, héros des déshérités, Paris, Editions Estrella, 2016. Préface d’Ignacio Ramonet.
Page Facebook : https://www.facebook.com/SalimLamraniOfficiel
Sources de l'article : Témoignages
[1] Donald Trump, « Remarks by President Trump on the Policy of the United States Towards Cuba », 16 juin 2017. https://www.whitehouse.gov/the-press-office/2017/06/16/re... (site consulté le 22 mars 2018).
[2] Oficina Nacional de Estadística e Información, “Anuario estadístico de Cuba 2016. Turismo”, 2017, p. 8. http://www.one.cu/aec2016/15%20Turismo.pdf (site consulté le 22 mars 2018).
[3] Mimi Whitefield, « 100,000 Cuban Homes Slammed by Hurricane Irma Await Repairs Months Later », The Miami Herald, 15 janvier 2018.
[4] Rex W. Tillerson, « Actions Taken in Response to Attacks on U.S. Government Personnel in Cuba », U.S. Department of State, 29 septembre 2017. https://www.state.gov/secretary/remarks/2017/09/274514.htm (site consulté le 22 mars 2018).
[5] Rex W. Tillerson, « On the Expulsion of Cuban Officials From the United States », U.S. Department of State, 3 octobre 2017. https://www.state.gov/secretary/remarks/2017/10/274570.htm (site consulté le 24 mars 2018).
[6] Rex W. Tillerson, « Actions Taken in Response to Attacks on U.S. Government Personnel in Cuba », op.cit.
[7] Bruno Rodríguez Parilla, « No existen pruebas de ataque sónico a diplomáticos de Estados Unidos », Cubadebate, 3 novembre 2017.
[8] Peter Kornbluh, « What the US Government Is Not Telling You About Those ‘Sonic Attacks’ in Cuba », The Nation, 7 mars 2018.
[9] Rex W. Tillerson, « Actions Taken in Response to Attacks on U.S. Government Personnel in Cuba », op.cit.
[10] U.S. Department of State, « End of Ordered Departure at U.S Embassy Havana », 2 mars 2018. https://www.state.gov/r/pa/prs/ps/2018/03/278997.htm (site consulté le 24 mars 2018).
[11] Mario J. Pentón, « To Reunite With Family in Miami, These Cubans Must Travel to Bogota », The Miami Herald, 15 mars 2018.
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26/11/2016
Cuba, c’est fini ?
Cuba ou une île et son peuple qui ne seront jamais ordinaire !
par José Fort
« Tu ne crois pas qu’il faut, vite, faire un tour à Cuba, après il sera trop tard ? » Combien de fois ai-je entendu cette question au cours des dernières semaines ? Depuis le rétablissement des relations diplomatiques entre Washington et La Havane, le voyage d’Obama dans la Grande Ile, le débarquement massif des touristes, la multiplication des vols aériens entre les capitales du monde entier et les principales villes cubaines, après l’ouverture de la zone spéciale, après, après, après… les courageux et honnêtes défenseurs de la révolution et ceux qui rêvent de la détruire s’interrogent de la même manière avec des objectifs différents : « Cuba, c’est fini ? »
Il n’est pas exagéré de poser la question. L’argent, le fric, le business, les combines, ne vont-ils pas pervertir les idéaux révolutionnaires ? Ne convient-il pas mieux de s’interroger autrement : le peuple cubain qui a enduré tant de privations découlant d’un blocus économique criminel décrété par la première puissance mondiale, qui a résisté aux provocations, au terrorisme inspiré par les officines yankees, CIA en tête, n’a-t-il pas le droit lui aussi de vivre mieux, plus confortablement, dans la sécurité, avec de meilleurs salaires, libre de décider son destin et ouvert sur le monde ? Il est inutile de chercher à tout prix à mourir beaux, cela n’empêche pas de passer à trépas souffrants et amers.
Je suis toujours étonné, à propos de Cuba, de lire et d’entendre tant d’imbéciles sphériques. Tu peux les tourner dans n’importe quel sens, ils se révèlent toujours aussi stupides ânonnant comme leurs ancêtres et cela depuis plus de 50 ans les mêmes clichés, les mêmes formules, les mêmes preuves d’inculture à la parisienne décadente. Aucune connaissance de l’Histoire cubaine dans sa lutte légendaire pour l’indépendance et donc incapable de comprendre l’éternelle aspiration à la souveraineté, véritable ciment de la société. Insuffisance, aveuglement, bref ignorance crasse, caractérisent ces messieurs dames donneurs de leçons repliés dans leurs certitudes et leur incompétence. Cuba n’est pas à vendre, le démontre et va continuer de le démontrer. Croyance mystique ou réalité ?
Dans un monde aussi complexe tant sur le plan économique que social et politique, Cuba ne peut rester un îlot isolé dans une planète en surchauffe. Comme toutes les sociétés, la société cubaine évolue, aspire à des changements et regarde ailleurs, espère tirer profit du meilleur. Et alors ?
Cuba poursuit son chemin dans un environnement défavorable. Avec un objectif : construire un socialisme moderne à la cubaine. Dirigeants et experts ont beaucoup voyagé ces derniers temps. Ils sont partis observer les expériences ici et là. Au retour, ils ont mis dans un pot commun, bien agité l’ensemble avec un ingrédient essentiel : la sauce cubaine, celle qu’on ne retrouve nulle part ailleurs. Dans le même mouvement, une nouvelle génération de cadres et de dirigeants se met progressivement en place, les vieux dirigeants de la révolution laissant la place et prenant une retraite méritée. Le récent congrès du parti communiste cubain vient de s’imprégner de ces changements avec comme ambition affichée la construction d’un socialisme adapté à une société moderne et cultivée. Bonne chance Cuba.
José Fort
Témoignage d'une jeune française qui suit des études à la Havane
Appel de Maïssara "j étais en boîte de nuit à la Havane. ..quand le DJ a allumé les lumières, puis changé la chaîne de la télévision qui diffusait du sport pour passer sur l allocution de Raul Castro.
Le visage de Fidel apparaît et le DJ nous annonce qu il est "parti". Consternation, tristesse. ..puis tout le monde chante l hymne national Cubain."
13:07 Publié dans Actualités, AL-Pays : Cuba, Histoire, Point de vue | Tags : cuba, fidel castro, josé fort | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook | | |
29/03/2016
LE FRERE D'OBAMA
Nous n’avons pas besoin que l’empire nous fasse cadeau de quoi que ce soit. Nos efforts seront légaux et pacifiques, parce que tel est notre engagement envers la paix et la fraternité de tous les êtres humains qui vivons sur cette planète
Les rois d’Espagne nous ont amenés les conquistadors et les propriétaires, dont les traces sont restées empreintes dans les parcelles de terre circulaires assignées aux chercheurs d’or dans les sables des rivières, une forme abusive et honteuse d’exploitation dont on peut apercevoir encore les vestiges depuis les airs dans de nombreux endroits du pays.
Le tourisme, aujourd’hui, consiste en grande partie à montrer les délices des paysages et à savourer les mets exquis de nos mers, à condition de les partager avec le capital privé des grandes sociétés étrangères, dont les recettes ne méritent aucune attention si elles ne se chiffrent pas par milliards de dollars per capita.
Puisque je me suis vu obligé de mentionner le sujet, je me dois d’ajouter, notamment à l’attention des jeunes, que rares sont ceux qui se rendent compte de l’importance d’une telle condition en ce moment singulier de l’histoire humaine. Je n’irai pas jusqu’à dire que le temps a été perdu, mais je n’hésite pas à affirmer que nous ne sommes pas suffisamment informés, ni vous, ni nous, des connaissances, de la prise de conscience qu’il nous faudrait pour relever les défis de la réalité. La première chose à prendre en compte, c’est que nos vies sont une fraction de seconde au regard de l’Histoire, qu’il faut aussi partager les besoins vitaux de tout être humain. Une des particularités de celui-ci réside dans la tendance à la surévaluation de son rôle, ce qui contraste par ailleurs avec le nombre extraordinaire de personnes qui incarnent les rêves les plus élevés.
Personne, cependant n’est bon ni mauvais en soi. Aucun d’entre nous n’est préparé au rôle qu’il est appelé à assumer dans la société révolutionnaire. En partie, nous, les Cubains, avons eu le privilège de compter sur l’exemple de José Marti. Je me demande même s’il aurait dû mourir ou pas à Dos Rios, lorsqu’il dit « Pour moi, il est temps », et qu’il chargea les forces espagnoles retranchées derrière une solide ligne de feu. Il ne voulait pas retourner aux États-Unis et personne n’aurait pu l’en obliger. Quelqu’un arracha quelques feuilles de son journal. Qui a bien pu commettre cette faute perfide, si ce n’est sans aucun doute un intrigant sans scrupules ? On connaît les divergences qu’il y avait entre les Chefs, mais jamais d’indisciplines.
« Quiconque tentera de s’emparer de Cuba ne recueillera que la poussière de son sol baigné de sang, s’il ne périt pas dans la bataille ! », s’était écrié le glorieux leader noir Antonio Maceo. Maximo Gomez est également reconnu comme le chef militaire le plus discipliné et discret de notre histoire.
Vu sous un autre angle, comment ne pas être saisi d’admiration devant l’indignation de Bonifacio Byrne lorsque, depuis l’embarcation lointaine qui le ramenait à Cuba, ayant aperçu un autre drapeau à côté de la bannière de l’étoile solitaire, déclara : « Mon drapeau est celui qui n’a jamais été mercenaire… », avant d’ajouter aussitôt l’une des plus belles phrases qu’il m’ait été donné d’entendre : « Si un jour mon drapeau est déchiré en petits morceaux / nos morts levant les bras / sauront encore le défendre ! » Jamais je n’oublierai non plus les paroles enflammées de Camilo Cienfuegos ce soir-là, lorsqu’à plusieurs dizaine de mètres des bazookas et des mitrailleuses d’origine nord-américaine aux mains de contre-révolutionnaires, était braquées sur la terrasse où nous étions. Obama était né en août 1961, comme il l’a lui-même expliqué. Plus d’un demi-siècle devait s’écouler depuis ce moment-là.
Voyons cependant comment pense aujourd’hui notre illustre visiteur :
« Je suis venu pour enterrer les derniers vestiges de la guerre froide dans les Amériques. Je suis venu tendre la main de l’amitié au peuple cubain ».
Tout de suite après, un déluge de concepts, complètement nouveaux pour la plupart d’entre nous :
« Vous comme nous, nous vivons dans un nouveau monde colonisés par les Européens », devait ajouter le Président des États-Unis. « Cuba, à l’instar des États-Unis, a été construite en partie par les esclaves amenés ici en provenance d'Afrique. Comme les États-Unis, le peuple cubain a un héritage d’esclaves et d’esclavagistes ».
Les populations autochtones n’existent en rien dans l’esprit d’Obama. Il ne dit pas non plus que la discrimination raciale fut balayée par la Révolution ; que les retraites et les salaires de tous les Cubains furent décrétés par cette même Révolution avant que M. Obama lui-même n’est fêté ses 10 ans. L’odieuse habitude bourgeoise et raciste d’engager des sbires pour que les citoyens noirs soient expulsés des centres de loisirs fut balayée par la Révolution cubaine. Celle-ci entrera dans l’Histoire pour la bataille qu’elle a livrée en Angola contre l’apartheid, en mettant fin à la présence d’armes nucléaires dans un continent de plus d’un milliard d’habitants. Tel n’était pas le but de notre solidarité, mais d’aider les peuples d’Angola, du Mozambique, de Guinée Bissau et autres de la domination coloniale fasciste du Portugal.
En 1961, à peine un an et trois mois après le triomphe de la Révolution, une force mercenaire équipée de canons et d’infanterie blindée et d’avions, entraînée et escortée par des bâtiments de guerre et des porte-avions des États-Unis, lança une attaque surprise contre notre pays. Rien ne pourra justifier cette attaque en traître qui coûta à notre pays des centaines de pertes, entre morts et blessés. Sur cette brigade d’assaut pro-yankee, il n’est établi nulle part qu’un seul mercenaire aurait pu être évacué. Des avions de combats yankees furent présentés aux Nations Unies comme appartenant à des forces cubaines mutinées.
Nous connaissons largement l’expérience militaire et la puissance de ce pays. En Afrique, ils ont également cru que la Cuba révolutionnaire serait facilement mise hors de combat. L’attaque lancée par le sud de l’Angola par les brigades motorisées de l’Afrique du Sud raciste les amena aux abords de Luanda, la capitale de ce pays. Ici s’engagea une bataille qui allait durer pas moins de 15 ans. Je ne parlerais même pas de ces choses-là, s’il n’avait pas été de mon devoir élémentaire de répondre au discours d’Obama au Grand théâtre de La Havane Alicia Alonso.
Je ne tenterai pas non plus de donner des détails. Je tiens juste à souligner que sur ces terres fut écrite une page glorieuse de la lutte pour la libération de l’être humain. D’une certaine manière, j’aurais souhaité que la conduite d’Obama fût correcte. Ses origines humbles et son intelligence naturelle étaient évidentes. Mandela était prisonnier à vie et il était devenu un géant de la lutte pour la dignité humaine. Un jour, j’ai pu avoir entre mes mains une copie du livre qui raconte une partie de la vie de Mandela, et quelle ne fut pas ma surprise en découvrant qu’elle était préfacée par Barack Obama. Je l’ai feuilleté rapidement. C’était incroyable de voir l’écriture minuscule de Mandela, ses notes précisant des données. Cela vaut la peine d’avoir connu des hommes tels que lui.
Concernant l’épisode d’Afrique du Sud, j’aimerais rappeler une autre expérience. Je souhaitais vraiment connaître plus en détails la manière dont les Sud-africains s’étaient procuré les armes nucléaires. Je ne disposais que de l’information précise selon laquelle ils n’avaient pas plus de 10 ou 12 bombes. Une source de confiance serait le professeur et chercheur Piero Gleijeses, qui avait rédigé le texte de « Missions en conflit : La Havane, Washington et l’Afrique 1959-1976 », un excellent travail. Je savais qu’il constituait la source la plus sûre sur ces événements, et je le lui ai fait savoir. Il m’a répondu qu’il n’avait plus reparlé de la question, car dans le texte il avait répondu à la question du camarade Jorge Risquet, qui avait été ambassadeur ou coopérant cubain en Angola, et dont il était un ami très proche. J’ai réussi à joindre Risquet, qui s’acquittait d’autres tâches importantes et était attelé à terminer un cours qui devait encore lui prendre quelques semaines. Cette tâche coïncida avec un voyage assez récent de Piero à notre pays. Je lui avais fait savoir que Risquet avait un certain âge et que son état de santé n’était pas optimal. Quelques jours après, il s’est passé ce que je redoutais. L’état de Risquet a empiré et il est décédé. À l’arrivée de Piero, il n’y avait plus rien à faire, à part des promesses, mais j’avais quand même pu obtenir des informations sur ce qui avait trait à ce genre d’armes et sur l’aide que l’Afrique du Sud raciste avait obtenue de Reagan et d’Israël.
J’ignore ce qu’Obama aura à dire sur cette histoire. J’ignore ce qu’il savait ou pas, même s’il est difficile de croire qu’il ne savait absolument rien. Ma modeste suggestion est qu’il réfléchisse et qu’il n’essaie pas d’élaborer des théories sur la politique cubaine.
Il y a une question importante :
Obama a prononcé un discours où il utilise des mots mielleux pour signaler : « Il est temps d’oublier le passé, laissons le passé en arrière, regardons vers l’avenir, regardons-le ensemble, un avenir d’espoir. Et ceci ne sera pas facile, il y aura des défis, et nous allons leur laisser le temps. Mais mon séjour ici me remplit d’espoir sur ce que nous pouvons faire ensemble comme des amis, comme des familles, comme des voisins, ensemble ».
Il est à supposer que chacun d’entre nous a frôlé l’infarctus en écoutant ces paroles du Président des États-Unis. Après un blocus impitoyable qui dure depuis près de 60 ans… et ceux qui sont morts victimes des attaques mercenaires contre des bateaux et des ports cubains… un avion de ligne plein de passagers fait exploser en plein vol, des invasions mercenaires, toutes sortes d’actes de violence et de force ?
Que personne ne se fasse d’illusions sur le fait que le peuple de ce pays noble et désintéressé renoncera à la gloire et aux droits, à la richesse spirituelle qu’il a acquise par le développement de l’éducation, la science et la culture.
J’avertis en outre que nous sommes capables de produire des aliments et les richesses matérielles dont nous avons besoin grâce aux efforts et à l’intelligence de notre peuple. Nous n’avons pas besoin que l’empire nous fasse cadeau de quoi que ce soit. Nos efforts seront légaux et pacifiques, parce que tel est notre engagement envers la paix et la fraternité de tous les êtres humains qui vivons sur cette planète.
Fidel Castro Ruz
Le 27 mars 2016
18:48 Publié dans AL-Pays : Cuba, AL-Pays : Cuba CNI, Point de vue, Politique | Tags : fidel castro, cuba, lettre, obama | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook | | |