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04/03/2014

ARGENTINE : LE TEMPS DES TORTURES (exclusif) (1)

joko.jpgAprès le retour du général Peron en 1973, qui se solde par le massacre d'Ezeiza (affrontements entre la gauche et la droite péroniste), le pays s'enfonce dans une « guerre sale », qui commence, dans la province de Tucumán, dès l'Opération Indépendance, qui impliquait l'enlèvement de dissidents politiques et leur séjours dans des centres de détention clandestins, où ils étaient torturés.

La très grande majorité n'y a pas survécu. À cette occasion, les leçons apprises lors de la bataille d'Alger sont mises en pratique.

En mars 1976, un coup d'État dirigé par une junte de militaires (Jorge Videla, etc.) renverse la troisième femme de Péron, Isabel Martínez de Perón. La CONADEP (en) -Commission Nationale sur la Disparition des Personnes, établie par le gouvernement démocratique de Raúl R. Alfonsín, a estimé que la répression militaire a fait au moins 30 000 victimes, dans la majorité des « disparus ».

Buenos Aires participe en outre à l’opération Condor, et de nombreux réfugiés politiques de pays voisins sont assassinés par le biais des services secrets ou d'escadrons de la mort (la Triple A). L'ambassade américaine est souvent au courant et a soutenu de fait ces tortures et massacres,

Sources Wikipédia

Cuba 2014 vous donne le témoignage exclusif d'une de ces prisonnière, qu'elle en soit remerciée

LE SYSTÈME PÉNITENTIAIRE DANS LE PÉNITENCIER DE VILLA GORRITI, PROVINCE DE JUJUY, ARGENTINE (1975-1977)

joko4.jpgJoko”, Martina Chávez

À tous les compagnons disparus de Jujuy, et parce que leurs idéaux et les nôtres son toujours et plus que jamais présents.

Aux compagnes Dominga Álvarez, Alicia Ranzoni, Juana Torres et Marina Vilte, que je vis en vie au pénitencier de Villa Gorriti y que lors d’une de ces incessantes «commissions» ils firent disparaître.

À mes compagnes comme moi survivantes, Gladis Artunduaga, Dora Weisz, Sara Murad, Mercedes Zalázar, avec qui j’ai partagé des moments de douleur, mais aussi des rêves d’un autre lendemain. À tous les compagnons d’Argentine disparus.

Éclaircissements

Tout au long de ce récit s’est posé un problème lié à la mémoire, ma propre mémoire. L’enfermement que j’ai souffert à cette époque a laissé ses séquelles et il m’a été impossible de traduire en dates des événements de grande importance comme le furent nos transferts successifs ou des faits quotidiens de l’enfermement.

La partie concernant ma détention n’est pas rattachée au présent témoignage; elle appartient à un autre chapitre que je rédige. Lorsque je me suis retrouvée exilée, j’ai assumé ma responsabilité de prisonnière politique, de militante, et j’ai fourni mon témoignage.

Aujourd’hui je me rends compte que je l’ai fait comme s’il s’était agi d’une autre personne et non pas de moi-même, afin d’éviter la souffrance, et étant donné qu’il s’agissait de l’urgence de sauver des vies. Ce récit est dédié à toutes pour tout ce que nous avons partagé et continuons à partager Malgré la distance et le temps qui s’est écoulé.

La prison du Bon Pasteur

On m’a détenue le 16 mars 1975, mais je ne suis pas sûre de la date du fait que je suis passée par diverses allées et venues d’une prison à l’autre : gendarmerie de Ledesma, locaux de la police de San Pedro, Département central de police de San Salvador de Jujuy, pour y subir des interrogatoires.

En dernier lieu on me transféra à la prison du Bon Pasteur, entre le 22 et le 25 mars. Cette prison est située pratiquement en plein centre de la capitale San Salvador de Jujuy. Lorsque j’y arrivai détenue s’y trouvaient déjà plusieurs compagnes (compagnes de lutte), parmi lesquelles: Sara Murad, Gladis Artunduaga, Dora Rebecchi de Weisz, Soledad López, Mercedes Zalázar, Ninfa Hochkofler, et arrivera plus tard Ana María Martínez.

Nous partagions cette prison avec des prisonnières sociales, avec lesquelles nous finîmes par entretenir de bonnes relations de convivialité. En sus de leur dire que les sœurs abusaient d’elles, car elles les exploitaient les faisant travailler depuis 6 heures du matin jusqu’à très tard dans la nuit. Je n’ai jamais pu savoir qui tirait profit de cette situation. Sûrement les mêmes qui avaient ordonné notre détention.

Quant à nous autres, nous étions trois ou quatre par cellule, tout étant parfaitement ordonné pour que nous sachions bien que nous étions là pour nous nous transformer en demoiselles creuses et sans aucune consistance.

Dans le pays on n’avait pas encore autorisé les lieux tristement célèbres comme les prisons de sécurité maximales ou les lieux secrets de détention, ce en quoi sera transformée la prison de Villa Gorriti, de laquelle on sortait des gens pour qu’ils soient torturés et fusillés.

En effet, à Jujuy, on compte les pénitenciers de Villa Gorriti, Guerrero, et plus tardivement d’autres lieux qui restent à identifier, comme celui récemment cité par Nélida Fidalgo.

La révélation de l’existence d’un lieu qui aurait fonctionné comme centre clandestin de détention, «Puesto Mendoza», et qui n’avait jamais été dénoncé auparavant, ouvre une importante piste d’enquête dans le procès.

Le régime interne de la prison du Bon Pasteur ressemblait assez de par certains aspects à celui des prisonnières sociales, à la différence que les sœurs devaient envoyer périodiquement des rapports sur notre conduite, et elles assumaient bien cette fonction.

D’un autre côté les prisonnières de droit commun étaient soumises au travail forcé, la majorité d’entre elles n’atteignaient pas les 25 ans d’âge, et étaient filles du prolétariat agricole dépendant des fincas (grandes exploitations) des grands propriétaires terriens de la région et de la Puna, abandonnée par l’Argentine.

De manière spontanée, sans aucun type de structure organisationnelle, avec le seul instinct de survie hérité de la culture ancestrale de nos peuples originaires, se développa un système de résistance pour la survie.

A suivre.....

 

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