"Épidémie de suicide" chez les jeunes amérindiens de Guyane
16/12/2015
Ils ne sont plus que 10.000 dans le département français de Guyane. Abandonnés, isolés, perdus entre modernité et modes de vie traditionnels, de trop nombreux jeunes amérindiens mettent fin à leurs jours. Deux députés sonnent l’alarme.
"Le drame stupéfiant du suicide chez les jeunes se déroule dans le silence le plus complet: il faut absolument mettre des moyens y compris sous forme dérogatoire", a déclaré Aline Archimbaud, sénatrice (EELV) de Seine-Saint-Denis. Avec la députée (PS) d'Ille-et-Vilaine Marie-Anne Chapdelaine, elle vient de remettre un rapport d’enquête à la ministre des Outre-mer.
Elles estiment que "l'on peut parler sans exagération +d'épidémie de suicides+". Ces jeunes amérindiens se suicident en effet 8 à 10 fois plus que la moyenne des Guyanais.
"Ces populations se sentent abandonnées, il y a une immense désespérance", a souligné Mme Archimbaud. Le rapport met en évidence de nombreuses causes, rappelant que ces citoyens français "n'ont pas accès à des droits fondamentaux comme l'eau, l'électricité ou le téléphone", sans parler d'un accès à la santé ou à l'emploi. Une crise identitaire est également évoquée, chez ces jeunes tiraillés entre la modernité et les modes de vie traditionnels. Et ce d’autant plus que ces populations sont parfois stigmatisées dans le département.
Sans tabou, les députées ont également travaillé sur le fléau de l’alcoolisme et des violences interfamiliales.
Le tableau du "mal vivre" de ces amérindiens de Guyane est glaçant. En conséquence, le rapport comporte 37 propositions pour prévenir les suicides. 16 sont considérées comme "prioritaires".
Il s'agit du "renforcement immédiat" de la prise en charge psychiatrique des suicidaires et de leur famille, avec l'intervention (comme en métropole) d'une cellule d'urgence en mois de 24 heures. Mais, souligne le rapport, comment réussir "quand il n’existe aucun moyen de transport pratique et immédiat pour mettre une telle équipe de professionnels à pied d’œuvre ?". Le rapport préconise la mise en place d'antennes médicopsychologiques à Camopi et Maripasoula, des communes très touchées.
Il s'agit aussi de réaliser les infrastructures élémentaires (eau, électricité, internet, téléphone) et de "répondre à la forte demande en termes d'éducation", a souligné Marie-Anne Chapdelaine, parlant de la nécessité de généraliser la "collation" pour les enfants, de permettre des retours en pirogue le week-end des collégiens scolarisés loin de chez eux, ou de garder ouverts les internats pour lycéens à Cayenne.
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